La rouqyâ et le ta’wîdh : Distinguer le licite de l’illicite…
Chers frères,
Nous avions évoqué lors d’une précédente intervention (lire : Magie et sorcellerie : des actes de mécréance majeure… ) que la magie et la sorcellerie constituent des moyens fréquemment employés par chaytân pour tenter de faire perdre au croyant son îmân (foi). Ce qu’il faut également savoir, c’est que le diable ne se limite pas à encourager des gens à avoir recours au sihr pour faire du mal à autrui : parallèlement à cela, il se tourne vers les personnes qui sont les cibles de ces agissements démoniaques et s’active à les faire sombrer, à leur tour, dans le koufr et la mécréance, et ce, en les poussant à adopter, dans leurs efforts pour se traiter des effets dévastateurs du sihr, des attitudes ou des pratiques en contradiction totale avec le tawhîd (foi en l’Unicité de Dieu). D’où l’importance, pour chaque musulman et musulmane, de bien connaître quels sont les moyens acceptables et licites pour se faire soigner des affections occultes. C’est justement là le thème que nous allons évoquer brièvement au cours de la présente intervention.
Mais avant même d’aborder ce sujet, il est important de rappeler que, contre la magie et la sorcellerie, il est de notre devoir d’agir de façon préventive, en faisant déjà du mieux que nous pouvons pour nous protéger des chayâtîn : en effet, si nous acceptons d’accueillir librement ces derniers, si nous leur offrons une totale liberté d’action, ou, pire, si nous leur accordons soutien et assistance, il ne faut pas s’étonner ensuite que nous constituons des cibles très aisément accessibles pour le sihr-qui fait justement appel à ces mêmes chayâtîn…
Les actions préventives
Lorsqu’on revient vers nos références premières, on constate que pour se mettre à l’abri des démons, le principal impératif pour chacun de nous est de redonner à la pensée d’Allah (dhikr oullâh) la place centrale qui lui revient dans notre existence -une place qu’elle n’aurait, à vrai dire, jamais du perdre- et à revivifier ainsi notre cœur (le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a comparé dans un Hadith celui qui ne pense pas à Allah à un cadavre)…
Dans la pratique, cela consiste notamment [1] :
· à prendre le nom d’Allah et à réciter les douas enseignés avant d’entamer les actions courantes (et licites) de la vie quotidiennes, avant d’entrer et en sortant de chez soi par exemple, ou avant de manger, ou même avant d’approcher intimement son épouse… Il faut dire que, vu l’insouciance qui règne actuellement, on peut dire que chaytân est quotidiennement nourri et logé chez pas mal d’entre nous.
o Djâbir (radhia Allâhou anhou) affirme – J’ai entendu le Messager d’Allah (sallallâhou alayhi wa sallam) dire :
إِذا دخل الرَّجُل بيْتَهُ، فَذَكَرَ اللَّه تعَالى عِنْد دُخُولهِ وعِنْدَ طَعامِهِ قال الشَّيْطانُ لأَصحَابِهِ لا مبيتَ لَكُمْ ولا عشَاءَ، وإذا دخَل فَلَم يَذكُر اللَّه تَعَالى عِنْد دخُولِهِ، قال الشَّيْطَانُ: أَدْركتمُ المبيت وإِذا لَم يَذْكُرِ اللَّه تعَالى عِنْد طَعامِهِ قال أَدْركْتُمُ المبيتَ وَالعَشاءَ
« Quand l’homme entre dans sa maison et prononce le nom d’Allah à son entrée et au début de son repas, le diable dit à ses compagnons: « Vous n’avez dans cette maison, ce soir, ni gîte, ni couvert. » Et quand il entre sans prononcer le nom d’Allah, le Diable leur dit: « Vous avez trouvé un gîte où vous pourrez passer la nuit. » Quand il ne prononce pas le nom d’Allah au moment du repas, le diable leur dit: « Vous avez trouvé, pour cette nuit, le gîte et le couvert. »
(Sahîh Mouslim)
o Ibnou ‘Abbâs (radhia Allâhou anhou) rapporte pour sa part que le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit :
لَوْ أَنَّ أَحَدَكُمْ إذَا أَرَادَ أَنْ يَأْتِيَ أَهْلَهُ قَالَ : بِسْمِ اللَّهِ ، اللَّهُمَّ جَنِّبْنَا الشَّيْطَانَ ، وَجَنِّبْ الشَّيْطَانَ مَا رَزَقْتنَا ، فَإِنَّهُ إنْ يُقَدَّرْ بَيْنَهُمَا وَلَدٌ فِي ذَلِكَ لَمْ يَضُرَّهُ الشَّيْطَانُ أَبَدًا
« Si lorsque l’un d’entre vous a l’intention d’approcher son épouse récite :
بِسْمِ اللَّهِ ، اللَّهُمَّ جَنِّبْنَا الشَّيْطَانَ ، وَجَنِّبْ الشَّيْطَانَ مَا رَزَقْتنَا
et que (la conception) d’un enfant leur est destiné lors de cette union, chaytân ne pourra jamais causer du tort à celui-ci (soit au moment de la naissance, soit, plus tard, en le possédant…)«
فَإِنَّهُ إنْ يُقَدَّرْ بَيْنَهُمَا وَلَدٌ فِي ذَلِكَ لَمْ يَضُرَّهُ الشَّيْطَانُ أَبَدًا
(Boukhâri et Mouslim)
· à présenter le salâm lorsqu’on entre chez soi. Abou Oumâmah Al Bâhiliy (radhia Allâhou anhou) rapporte que le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit :
ثَلاَثَةٌ كُلُّهُمْ ضَامِنٌ عَلَى اللَّهِ عَزَّ وَجَلَّ (…)وَرَجُلٌ دَخَلَ بَيْتَهُ بِسَلاَمٍ فَهُوَ ضَامِنٌ عَلَى اللَّهِ عَزَّ وَجَلَّ
« Trois personnes bénéficient d’une protection de la part d’Allah. (Parmi celles-ci, il y a) l’individu qui entre chez lui avec le salâm. »
(Sounan Abou Dâoûd – Authentifié par Al Albâni)
· à accomplir ses prières obligatoires à l’heure, plus particulièrement celle du matin. Djoundoub Ibn Abdillâh (radhia Allâhou anhou) affirme que le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit :
من صَلَّى الصبح فهو في ذِمَّةِ الله
« Celui qui prie la salât ous soubh (à l’heure), il est sous la protection d’Allah. »
(Sahîh Mouslim)
· à faire la lecture régulière des passages coraniques suivants chez soi :
o La Sourate oul Baqarah (Sourate 2) dans son intégralité. Abou Houreïrah (radhia Allâhou anhou) rapporte que le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit :
لاَ تَجْعَلُوا بُيُوتَكُمْ مَقَابِرَ إِنَّ الشَّيْطَانَ يَنْفِرُ مِنَ الْبَيْتِ الَّذِى تُقْرَأُ فِيهِ سُورَةُ الْبَقَرَةِ
« Ne faites de vos demeures des cimetières : (faites y la lecture du Qour’aane et le dhikr car) chaytân fuit de la maison dans laquelle la sourate oul baqarah est récitée. »
(Sahîh Mouslim)[2]
o Les deux derniers versets de cette même sourate. Chaddâd Ibnou Aws (radhia Allâhou anhou) rapporte que le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit :
إِنَّ اللَّهَ كَتَبَ كِتَابًا قَبْلَ أَنْ يَخْلُقَ السَّمَوَاتِ وَالْأَرْضَ بِأَلْفَيْ عَامٍ أَنْزَلَ مِنْهُ آيَتَيْنِ خَتَمَ بِهِمَا سُورَةَ الْبَقَرَةِ وَلَا يُقْرَأَانِ فِي دَارٍ ثَلَاثَ لَيَالٍ فَيَقْرَبُهَا شَيْطَانٌ
« Certes Allah (‘azza wa djalla) a écrit un Livre deux mille ans avant de créer les cieux et la terre. Et Il a révélé de celui-ci (c’est-à-dire de ce Livre) deux versets par lesquels Il a complété la sourate oul baqarah. Aucun chaytân ne peut (s’)approcher (et encore moins entrer dans) la maison où ces deux (âyât) sont récités. »
(Sounan Tirmidhi – Authentifié par Al Albâni)
o La âyat oul koursiy (Sourate 2 / Verset 255). Abou Houreïrah (radhia Allâhou anhou) raconte :
وَكَّلَنِى رَسُولُ اللَّهِ – صلى الله عليه وسلم – بِحِفْظِ زَكَاةِ رَمَضَانَ فَأَتَانِى آتٍ فَجَعَلَ يَحْثُو مِنَ الطَّعَامِ فَأَخَذْتُهُ فَقُلْتُ لأَرْفَعَنَّكَ إِلَى رَسُولِ اللَّهِ – صلى الله عليه وسلم – فَقَصَّ الْحَدِيثَ فَقَالَ إِذَا أَوَيْتَ إِلَى فِرَاشِكَ فَاقْرَأْ آيَةَ الْكُرْسِىِّ لَنْ يَزَالَ مَعَكَ مِنَ اللَّهِ حَافِظٌ وَلاَ يَقْرَبُكَ شَيْطَانٌ حَتَّى تُصْبِحَ . وَقَالَ النَّبِىُّ – صلى الله عليه وسلم – صَدَقَكَ وَهْوَ كَذُوبٌ ذَاكَ شَيْطَانٌ
Il réussit à capturer une fois un démon qui était venu voler durant trois nuits consécutives des grains qui avaient été donnés en guise d’aumône. Pour obtenir sa libération, celui-ci communiqua à Abou Houreïrah (radhia Allâhou anhou) un précieux enseignement. Il lui dit : « Lorsque tu entres au lit (pour te coucher), récite la âyat oul koursiy. Un protecteur de la part restera alors avec toi et aucun démon ne pourra t’approcher jusqu’au matin. » En apprenant cela, le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) dit : « Il t’a dit la vérité (cette fois-ci; sinon) il est un grand menteur. (…)«
(Sahîh oul Boukhâri)
o Les sourates protectrices (les deux dernières du Qour’aane avec la sourate oul ikhlâss) en trois fois matin et soir. Aïcha (radhia Allâhou anhâ) dit :
أَنَّ النَّبِىَّ – صلى الله عليه وسلم – كَانَ إِذَا أَوَى إِلَى فِرَاشِهِ كُلَّ لَيْلَةٍ جَمَعَ كَفَّيْهِ ثُمَّ نَفَثَ فِيهِمَا فَقَرَأَ فِيهِمَا ( قُلْ هُوَ اللَّهُ أَحَدٌ ) وَ ( قُلْ أَعُوذُ بِرَبِّ الْفَلَقِ ) وَ ( قُلْ أَعُوذُ بِرَبِّ النَّاسِ ) ثُمَّ يَمْسَحُ بِهِمَا مَا اسْتَطَاعَ مِنْ جَسَدِهِ يَبْدَأُ بِهِمَا عَلَى رَأْسِهِ وَوَجْهِهِ وَمَا أَقْبَلَ مِنْ جَسَدِهِ يَفْعَلُ ذَلِكَ ثَلاَثَ مَرَّاتٍ
« Le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam), lorsqu’il entrait au lit chaque nuit, il réunissait ses deux mains et soufflait (sans expulser de salive) dans celles-ci en récitant (les sourates) « qoul houwallâhou ‘ahad », « qoul ‘aoûdhou birabbil falaq » et « qoul ‘aoudhou birabbin nâss ». Puis il (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) les passait là où il le pouvait sur son corps, en commençant par sa tête, son visage et sa poitrine (littéralement : « la partie avant de son corps »). Il (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) faisait cela en trois fois.«
(Sahîh oul Boukhâri)
· à faire constamment les douâs de protection enseignés par le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam), notamment les invocations suivantes:
· أَعُوذُ بِكَلِمَاتِ اللَّهِ التَّامَّاتِ مِنْ شَرِّ مَا خَلَقَ
· بِسْمِ اللَّهِ الَّذِي لَا يَضُرُّ مَعَ اسْمِهِ شَيْءٌ فِي الْأَرْضِ وَلَا فِي السَّمَاءِ وَهُوَ السَّمِيعُ الْعَلِيمُ
(à réciter en trois fois)
En sus de ces différentes formules à réciter, il y a également une autre pratique qui assure une certaine protection contre les pratiques du sihr… Sa’d (radhia Allâhou anhou) rapporte que le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit :
مَنْ تَصَبَّحَ كُلَّ يَوْمٍ سَبْعَ تَمَرَاتٍ عَجْوَةً لَمْ يَضُرَّهُ فِي ذَلِكَ الْيَوْمِ سُمٌّ وَلَا سِحْرٌ
« Celui qui mange tous les matins sept dattes (de type) ‘adjwah (de Médine) ne sera affecté durant ce jour par aucun poison ni (acte de) sorcellerie. »
(Sahîh oul Boukhâri)
Enfin, il est important de faire de son possible pour éviter de créer (ou d’alimenter) de la rancœur et de la haine à notre égard, et ce, en s’abstenant (entre autres) :
· de causer du tort à autrui,
· de faire preuve d’injustice envers ceux qui nous entourent,
· d’être hautain et de faire preuve de suffisance dans nos propos et nos manières,
· d’exposer de façon ostentatoire les bienfaits qu’Allah nous accorde…
Ce sont là en effet les quatre facteurs qui entraînent le plus souvent l’apparition d’animosité tenace qui, à la longue, peuvent conduire nos opposants à chercher à nous nuire par tous les moyens possibles, même les plus lâches et les plus exécrables comme la sorcellerie…
Le traitement
Dans le cas où malgré toutes ces précautions, on finit quand même par être victime d’un acte de sihr –qu’Allah nous en protège tous. Âmîne !, il ne faut surtout pas se laisser aller à faire n’importe quoi, n’importe comment : en tant que musulman, nous avons le devoir de rester attachés aux principes et aux enseignements de notre dîn à tout moment et en toute circonstance… Pour faire face à cette terrible épreuve, il faut savoir que les méthodes qui sont à notre disposition peuvent être classées en trois catégories différentes :
1. Il y a d’abord celles qui impliquent des actes qui s’opposent carrément aux principes et enseignements de notre dîn ou dont on peut connaître la nature réelle, comme c’est le cas, par exemple :
· lorsqu’on fait appel à un individu qui invoque les forces sataniques pour annuler les effets du sihr
· réalise (ou on fait réaliser) des rites relevant du chirk (comme le fait de sacrifier un animal au nom d’un autre que Dieu (prophète, pieux personnage…)[3]
· lorsque la personne qui pratique l’exorcisme prononce des formules dont on ne peut comprendre le sens (et qui peuvent ainsi être destinés à invoquer l’aide des chayâtîn, des djinns maléfiques ou l’âme des personnes décédées…)
Le recours à ce genre de méthodes est bien évidemment interdit pour le musulman et peut même (en fonction de la nature des actes réalisés)entraîner l’annulation du îmân.
2. Il y a ensuite celles qui ont été pratiquées (ou approuvées) par le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) ou qui ont été encouragées par des savants et qui consistent exclusivement en l’utilisation de versets coraniques ou de douâs rapportés du Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam).
Exemples :
- La récitation de passages du Qour’aane suivants directement sur la personne qui est victime du sihr :
- La récitation de la formule « bismillâh » en trois fois, suivi de la lecture de l’invocation suivante en sept fois en posant la main droite aux endroits douloureux du corps de la personne malade[9] :
أَعُوذُ بِعِزَّة الله وَقُدْرَتِهِ مِنْ شَرِّ مَا أَجِدُ وَأُحَاذِرُ
« a’oûdhou bi ‘izzat illâhi wa qoudratihi min charri mâ adjidou wa ouhâdhir »
- La récitation de douas suivants:
أَعُوذُ بِكَلِمَاتِ اللَّهِ التَّامَّةِ مِنْ كُلِّ شَيْطَانٍ وَهَامَّةٍ ، وَمِنْ كُلِّ عَيْنٍ لاَمَّةٍ
« a’oûdhou bi kalimâtillâhit taam-mâti min koulli chaytânin wa hâm-mah wa min koulli ‘aynin lâm-mah »[10]
أَللَّهُمَّ رَبَّ النَّاسِ أَذْهِبِ الْبَاسَ ، اشْفِهِ وَأَنْتَ الشَّافِى ، لاَ شِفَاءَ إِلاَّ شِفَاؤُكَ ، شِفَاءً لاَ يُغَادِرُ سَقَمًا
« allâhoumma rabban nâss ‘adh-hibil ba’sa ichfihi wa antach châfiy lâ chifâ a illâ chifâouka chifâ’an lâ youghâdirou saqaman »[11]
بِاسْمِ اللَّهِ أَرْقِيكَ مِنْ كُلِّ شَىْءٍ يُؤْذِيكَ مِنْ شَرِّ كُلِّ نَفْسٍ أَوْ عَيْنِ حَاسِدٍ اللَّهُ يَشْفِيكَ بِاسْمِ اللَّهِ أَرْقِيكَ
« bismillâhi arquîka min koulli chay’in you’dhîka min charri koulli nafsin aw ‘aynin hâssidin Allâhou yachfîka bismillâh ‘arquîka »[12]
أَعُوذُ بِوَجْهِ اللَّهِ الْعَظِيمِ الَّذِي لَيْسَ شَيْءٌ أَعْظَمَ مِنْهُ وَبِكَلِمَاتِ اللَّهِ التَّامَّاتِ الَّتِي لَا يُجَاوِزُهُنَّ بَرٌّ وَلَا فَاجِرٌ وَبِأَسْمَاءِ اللَّهِ الْحُسْنَى كُلِّهَا مَا عَلِمْتُ مِنْهَا وَمَا لَمْ أَعْلَمْ مِنْ شَرِّ مَا خَلَقَ وَبَرَأَ وَذَرَأَ
« ‘aoûdhou bi wadjhillâhil ‘adhîm al-ladhî layssa chay’oun a’dhama minhou wa bikalimâtillâhit tâm-mâtil latiy lâ youdjâwizouhounna barroun wa lâ fâdjiroun wa bi asmâ illâhil housnâ koullihâ mâ ‘alimtou minhâ wa mâ lam a’lam min char-ri mâ khalaqa wa bara a wa dhara a »[13]
Le recours à ce second type de traitements contre les affections d’origine occulte est bien évidemment licite (et même recommandé lorsqu’il s’agit de pratiques rapportées directement du Prophète (sallallâhou ‘alayhi wa sallam)). Bien évidemment, on doit rester fermement convaincu que le ta’widh et la rouqyâh ne sont que des moyens, qu’ils n’agissent que par la permission d’Allah et que le seul véritable guérisseur est Dieu.
Il faut souligner que, pour augmenter l’efficacité de cette méthode de traitement, il est important que les invocations qui sont faites au cours de celle-ci le soient en toute sincérité, avec dévotion, attention, concentration, détermination et insistance (il est recommandé de répéter les formules de douâ en trois fois), en étant convaincu qu’elles seront acceptées. Et en cas de besoin, il faut renouveler les douâs régulièrement: le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit en substance que les demandes qu’on adresse à Allah finissent par être acceptées, pour peu que l’on ne fasse pas preuve d’impatience et que l’on ne s’arrête pas de faire ces invocations en pensant qu’elles ne sont pas entendues… (Sens d’un hadith présent dans le Sahîh Mouslim)
3. Il y a enfin celles qui consistent en des pratiques licites mais qui n’ont pas pour autant été enseignées par le Prophète (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) ; leur efficacité a plutôt été établie par l’expérience.
Exemples:
- Réciter les passages coraniques cités précédemment (sourates al fâtiha, âyat oul koursiy, al mou’awidhât, versets des sourates al a’râf, yoûnous, tâ-hâ, …) sur un récipient d’eau (dans lequel on aura, si possible, ajouté sept feuilles de jujubes vertes broyées). Donner ensuite cette eau à la personne victime du sihr qui en boira une partie (trois gorgées) et en utilisera le reste pour se laver le corps. [14]
- Ecrire ces mêmes passages coraniques ou des invocations appropriées avec de l’encre. Laver ensuite cette encre et donner l’eau qui en ressort à la personne affectée. [15]
- Faire des invocations qui ne sont pas établies à partir du Qour’âne ou de la Sounnah et dont le sens est connu.
Le recours à ce genre de pratiques pour traiter les personnes affectées par la sorcellerie est, selon pas mal de oulémas, permis[16]sous les conditions suivantes :
- La personne qui a recours à la rouqyâ reste convaincue que les pratiques d’exorcisme n’ont aucun pouvoir propre et qu’elles ne constituent rien d’autres que des intermédiaires (asbâb) qui ne peuvent agir que par la Volonté et le Pouvoir d’Allah
- Les formules employées au cours de la rouqyâ restent compréhensibles. Il n’est ainsi pas permis d’utiliser des signes, des termes ou des expressions dont on ne peut connaître le sens et la signification, étant donné le risque que celles-ci expriment en réalité des croyances s’opposant au îmân.
Il est à noter que par rapport à ce troisième type d’exorcisme (qui est celui qui est le plus couramment pratiqué localement), il y a actuellement de graves dérives qu’il faut absolument éviter:
- Tout d’abord, il est essentiel de ne pas oublier que l’obéissance d’Allah est un devoir qui prime de loin sur le respect de ce genre de pratiques: Il s’agit de ne pas confondre moyen et objectif… Quand on sait que le but de cette rouqyâ est justement d’obtenir la guérison de la part d’Allah, on réalise combien il serait inconscient et irresponsable de notre part que de faire preuve (par exemple) d’un côté d’une grande rigueur et d’une ponctualité extrême dans les rituels d’exorcisme qui nous auraient été donnés par un râqiy et, dans le même temps, de faire preuve de négligence dans des obligations aussi essentielles que la salât.
- Ensuite il faut constamment garder à l’esprit, comme indiqué précédemment, que c’est Allah qui accorde la guérison et non pas le râqiy: ce dernier, en nous apportant son aide, n’agit qu’en tant que simple intermédiaire. Là encore, ce serait une terrible erreur que:
- D’un côté, l’on soit prêt à faire de son mieux (en donnant de son argent, de son temps et de sa personne) pour exprimer sa gratitude envers cet être humain qui nous a soutenu, et que, d’un autre côté, on ne fasse aucun effort (comparable ou digne de ce nom) pour manifester sa reconnaissance envers Dieu;
- Ou que, d’un côté, on ait une confiance inébranlable dans les compétences et les capacités du râqiy et que, d’un autre côté, on adopte une attitude qui exprime un manque de conviction évident en la Toute Puissance de Dieu.
- Il faut veiller également à ne pas valoriser exclusivement les rituels d’exorcisme qui ne trouve aucun fondement dans le Qour’âne ni la Sounnah et à témoigner du mépris (ou du moins de l’indifférence, et un manque d’intérêt évident) envers les méthodes de traitement qui ont été enseignées par la Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) ou qui consistent en la récitation de passages coraniques… Il serait ainsi insensé (par exemple) d’accorder plus d’intérêt à une rouqyâ élaborée par un simple être humain qu’à un traitement (en l’occurrence la récitation des mou’awidhât) qui a été révélé par Dieu Lui-même par l’intermédiaire du plus grand des anges pour soigner le plus grand des Messagers (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) lorsqu’il (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) avait été affecté par le sihr…
- Il faut encore faire très attention aux compétences que nous sommes prêts à reconnaitre au râqiy: ce dernier ne peut bien évidemment pas avoir des aptitudes qui sont propres à Allah. Malheureusement il n’est pas rare que certains guérisseurs affirment être capables, en ayant seulement recours à certains rituels obscurs, de connaître avec certitude une information qui relève pourtant (à leur niveau) de l’invisible – al ghayb. Ils se permettent ainsi (par exemple) d’accuser, en se basant sur un simple rêve, une vision ou une information prétendument communiquée par un djinn, une personne précise d’avoir pratiqué le sihr… Ce qui, en réalité, ne représente ni plus ni moins qu’une accusation de mécréance à son encontre (et ce, sur la base d’un rêve ou d’une vision…). Et quand on sait que le Prophète (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit que « lorsqu’un homme dit à son frère : « Ô kâfir ! », alors l’un d’entre eux retourne avec ce titre »(Boukhâri et Mouslim), on peut aisément mesurer la gravité de la chose… D’ailleurs, les auteurs
de ce genre de pseudo-révélations portent aujourd’hui une part de responsabilité dans la division qui mine notre communauté : par leurs accusations infondées, ils ont disloqué des familles entières, déchiré des amis de longue date et installé de façon durable de la suspicion et la méfiance entre les musulmans.
- Enfin, il faut garder une vigilance constante par rapport à la forme de la rouqyâ: il est de notre devoir de vérifier et de nous assurer clairement que les formules employées pour l’exorcisme ne s’opposent pas aux doctrines musulmanes (comme ce serait le cas par exemple pour une invocation adressée à une âme défunte ou à un djinn). Dans le cas où il y aurait le moindre doute ou la moindre ambigüité à ce niveau, il est nécessaire de s’abstenir.
Qu’Allah nous protège tous contre les méfaits des démons parmi les djinns et les hommes!
Qu’Allah guérisse toutes les personnes qui sont affectées par le sihr et les autres maux d’origines occultes!
Qu’Allah nous accorde à tous l’opportunité de rester sur la voie du Tawhîd jusqu’à la mort!
Âmîne!
- Par Mouhammad Patel
- Le 15 décembre 2007