Précisions concernant le martyr de l’Imâm Houssein (radhia Allâhou anhou)…

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Question: On rencontre assez souvent dans les milieux chiites l’analyse suivante concernant les tristes et pénibles circonstances qui ont conduit au martyr de l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou), petit-fils du Prophète (sallâhou alayhi wa sallam)… Selon eux, après que le fils de Mouâwiya (radhia Allâhou anhou), Yâzid, eut accédé au pouvoir, Housseïn (radhia Allâhou anhou) décida de partir à « Koûfa » avec les siens afin de manifester clairement son refus de reconnaître à Yazid une quelconque légitimité. Selon eux toujours, il savait pourtant pertinemment que lui et les siens allaient être massacrés, mais il avait quand même décidé de faire ce voyage et de se sacrifier, plutôt que de se soumettre à une autorité qu’il considérait illégitime et injuste…Est-ce que cette analyse historique est partagée par les historiens sounnites ?

Éléments de réponse: Selon les plus illustres historiens sounnites, l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) n’a pas quitté Médine pour l’Iraq (vers « Koufa », plus précisément) dans le but de combattre qui que ce soit, mais parce que les Koufiotes lui avait adressé un grand nombre de lettres et messages pour lui demander de venir parmi eux… En effet, ils désiraient faire acte d’allégeance (« Bay’ah ») sur ses mains et le désigner ainsi comme le nouveau chef des musulmans car ils refusaient de reconnaître l’autorité de Yazîd.

C’est exactement ce que soutient le très célèbre historien musulman Ibné Kathîr r.a., lorsqu’il évoque, dans son ouvrage « Al Bidâya wan Nihâyah », les circonstances qui ont conduit au départ de l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) de Makkah vers l’Iraq (malgré les mises en garde d’un certain nombre de Compagnons…).

Ainsi, selon les rapports qu’il présente, il est indiqué que l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou), après avoir reçu de nombreux témoignages de soutient de la part des habitants de Koûfa, envoya son cousin, Mouslim Ibné Aqîl r.a., pour s’enquérir de la réalité de la situation là bas, afin de lui en informer. Celui-ci reçut l’allégeance de pas moins de 18 000 Koûfiotes, qui firent devant lui le serment de soutenir et protéger, même au prix de leur vie, l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou)… En constatant ce soutient en masse et populaire, Mouslim r.a. envoya une lettre à l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) pour lui informer de tout cela et lui demander de venir au plus vite à Koûfa. C’est donc à la suite de cette lettre de Mouslim r.a. que l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) commença les préparatifs pour le départ, et c’est là que plusieurs personnes parmi les Compagnons (radhia Allâhou anhou) tentèrent, en vain, de le décourager. Ibné Abbas (radhia Allâhou anhou) lui rappela combien les gens de l’Iraq pouvait se révéler être des traîtres (comme cela avait été le cas déjà auparavant avec Hazrat Ali (radhia Allâhou anhou) et l’Imâm Hassan (radhia Allâhou anhou)) et qu’il ne fallait pas leur faire confiance… Mais l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) décida quand même de partir. Il avait pleinement confiance, notamment à cause de la confirmation de Mouslim r.a., en la loyauté des Koûfiotes, ce qui fit qu’il conduisit avec lui sa famille… En chemin, Abdoullâh Ibné Oumar (radhia Allâhou anhou) alla à sa rencontre pour essayer à nouveau de le décourager, mais il lui montra les sacs pleins de messages de soutient qu’il avait reçu de Koûfa, et lui fit part de son intention de continuer le voyage afin de rejoindre ceux qui l’attendaient…

Entre temps, les choses tournèrent mal à Koûfa, et Mouslim r.a. fut tué par Oubeïdoullah Ibné Ziyâd, qui venait d’être désigné par Yazîd comme gouverneur de la ville. Déjà, à cette occasion, les Koûfiotes, qui avaient assuré à Mouslim leur soutient, se retirèrent et le délaissèrent… Ce ne fut là qu’une nouvelle trahison de leur part, et pas la dernière…

Ibné Kathîr r.a. précise bien que l’Imâm Housseïn r.a., en entamant le voyage ne savait rien de tout cela. Ce ne fut qu’en chemin que l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) apprit la mort de Mouslim r.a….

Lorsqu’il arriva à Karbala et fit face à l’armée envoyée par Oubeïdoullah Ibné Ziyâd, il se rendit compte que ceux qui, justement, avaient promis de le soutenir, étaient maintenant là, en face de lui, pour l’arrêter… Il s’agissait là d’une de leur pires trahisons… En comprenant qu’il n’y avait pas d’autres alternatives, l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) soumit alors trois propositions à l’armée qui lui faisait face:

1- Soit ils le laissaient partir librement,

2- soit ils le conduisaient auprès de Yazid,

3- soit, ils le permettaient de rejoindre une ville côtière éloignée, afin qu’il puisse y prendre part au Djihâd (et y passer le reste de sa vie).

Mais l’armée envoyée par Oubeïdoullah refusa toutes ces propositions pour ne lui donner qu’un choix: se rendre à Koûfa et faire acte d’allégeance sur les mains de Oubeïdoullah Ibné Ziyâd. Il refusa cette alternative, ce qui déclencha une bataille (qui, comme on a pu le voir, n’était pas du tout prévue au départ, et même au moment où l’Imâm Housseïn (radhia Allâhou anhou) fit les trois propositions…) durant laquelle le petit fils béni du Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) fut martyrisé.

« Innâ lillâhi wa innâ ilayhi râdji’oûne » !

(« C’est à Allah que nous appartenons et c’est vers Lui que nous retournerons. »)

Voici donc en résumé la version donnée par Ibné Kathîr r.a. de ces tristes et déplorables évènements … Il est à noter que cette version est celle qui est présente (à quelques petites variantes près) dans les sources historiques sounnites les plus connues, comme les ouvrages de Ibné Djarîr r.a., de l’Imâm Dhahabi r.a, etc…

D’ailleurs, les éléments qui ont entraînés le départ de Housseïn (radhia Allâhou anhou) vers l’Iraq(en l’occurrence, les appels incessants et les très nombreux témoignages de confiance et de soutien de la part des Koûfiotes), telles que présentés par Ibné Kathir r.a. et les autres savants sounnites, sont également évoqués par certains historiens chiites de renommée tels que Al Mas’oûdi et Al Ya’qoûbi. (selon le rapport de leurs écrits qui en est fait dans l’ouvrage « Ach Chîah wat tachayyou’ – Firaq wa târîkh » de Ihsân Ali Dhahîr r.a.)

Wa Allâhou A’lam !

Et Dieu est Plus Savant !