Message aux jeunes à l’occasion de la proclamation des résultats du bac

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Bismillâhir Rahmânil Rahîm

Adaptation d’un discours prononcé à la Mosquée de St Pierre le Vendredi 11 Juillet 2008

Chers frères et sœurs,

Comme c’est toujours le cas après des examens, vous vous retrouvez aujourd’hui divisés en deux groupes : il y a ceux qui savourent leur succès… et il y a ceux et celles qui n’ont pu atteindre leur objectif. C’est à vous que je tiens d’abord à m’adresser…

Mes frères et sœurs,

J’imagine bien combien votre déception doit être grande en ce moment. Il est tout à fait normal que vous soyez affectés par ce qui vous est arrivé… Permettez-moi cependant de vous donner humblement deux conseils :

  • Tout d’abord, il faut que vous relativisiez cet échec. Vous le savez autant que moi, la vie présente est loin d’être un long fleuve tranquille. Notre existence n’est, au fond, qu’une succession d’épreuves… Et celle que vous connaissez en ce moment n’en est qu’une de plus : ce n’est ni la première –elle s’ajoute aux nombreuses autres que vous avez déjà connu jusqu’à présent, ni, de toute évidence, la dernière… Il n’est donc pas question que vous cédiez au découragement et que vous baissiez les bras. Au contraire, il vous faut rebondir au plus vite et faire de votre possible pour qu’une telle situation ne se renouvelle plus, en augmentant notamment vos douâs et vos efforts, et en faisant preuve de plus de rigueur dans votre travail durant toute l’année à venir.
  • Ensuite, il ne faut pas oublier que, dans ce monde, une absence de réussite au niveau matériel n’est jamais purement négative pour le croyant. Au contraire, à partir du moment où il adopte l’attitude adéquate et accueille l’épreuve qui s’abat sur lui avec sabr et patience, c’est-à-dire
    • qu’il ne se révolte pas et ne s’indigne face à cette décision divine,
    • que, à tout moment, il se garde de faire ou de dire quoique ce soit qui aille à l’encontre des enseignements de l’Islam,
    • qu’il reste convaincu que cette difficulté est liée à des causes bien définis dont Allah connaît la sagesse et le bien fondé,

celle-ci peut se transformer pour lui en un atout extraordinaire. Il est ainsi rapporté du Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) qu’il a dit :

مَا يُصِيبُ الْمُؤْمِنَ مِنْ نَصَبٍ وَلَا وَصَبٍ وَلَا هَمٍّ وَلَا حَزَنٍ وَلَا أَذًى وَلَا غَمٍّ حَتَّى الشَّوْكَةِ يَشَاكُهَاإِلَّا كَفَّرَ اللَّهُ بِهَا مِنْ خَطَايَاهُ

« Chaque fatigue (et douleur physique), maladie, souci, tristesse, difficulté ou peine qui affecte le croyant, jusqu’à (la souffrance, aussi minime soit-elle, provoquée par) l’épine qui le pique est un moyen par l’intermédiaire duquel Allah efface ses péchés (mineurs). » (Boukhâri et Mouslim)

Et dans un autre Hadith, il est relaté qu’une fois que le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) a dit, en s’adressant à Ibnou Abbâs (radhia Allahou ‘anhou) :

وَاعْلَمْ أَنَّ فِى الصَّبْرِ عَلَى مَا تَكْرَهُ خَيْراً كَثِيراً وَأَنَّ النَّصْرَ مَعَ الصَّبْرِ وَأَنَّ الْفَرَجَ مَعَ الْكَرْبِ وَأَنَّ مَعَ الْعُسْرِ يُسْراً

« Et sache qu’il y a dans la patience face à ce qui te déplaît un grand bien. Et l’aide (divine vient) avec la patience, le soulagement accompagne (de près) avec la douleur et la difficulté est(suivie) de la facilité. » (Mousnad Ahmad)

S’il y a bien une erreur à ne surtout pas faire dans les conditions actuelles -et à chaque fois que nous sommes éprouvés, c’est de perdre espoir en Allah et d’adopter une attitude qui aurait pour conséquence de nous éloigner de Lui : n’oublions jamais qu’Il est le Seul qui puisse réellement nous aider et nous assister.

Et dans le cas où nous L’avions invoqué et que, malgré nos douâs, nous n’avons pas obtenu le résultat que nous espérions, il ne faut surtout pas laisser chaytân nous persuader que les invocations ne servent à rien… Le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) nous a rappelé à maintes occasions que le douâest toujours bénéfique pour le croyant et il (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) nous a également appris qu’Allah se met en colère contre celui qui s’abstient de L’invoquer. Cependant, pour que nos requêtes soient entendues, il est nécessaire qu’elles soient adressées correctement (c’est-à-dire avec conviction, sincérité, dévotion, insistance, en veillant à ce que notre subsistance soit licite,…). Et il faut aussi savoir que l’acceptation d’un douâ ne se manifeste pas seulement par l’obtention de ce qui a été demandé : dans Sa Sagesse Infinie, Allah répond parfois autrement à nos invocations. C’est ce qu’indique ce Hadith que Abou Saïd Al Khoudriy (radhia Allahou ‘anhou) rapporte du Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) :

 ما مِنْ مُسْلِمٍ يَدْعُو بِدَعْوَةٍ لَيْسَ فِيهَا إِثْمٌ وَلاَ قَطِيعَةُ رَحِمٍ إِلاَّ أَعْطَاهُ اللَّهُ بِهَا إِحْدَى ثَلاَثٍ إِمَّا أَنْ تُعَجَّلَ لَهُ دَعْوَتُهُ وَإِمَّا أَنْ يَدَّخِرَهَا لَهُ فِى الآخِرَةِ وَإِمَّا أَنُْ يَصْرِفَ عَنْهُ مِنَ السُّوءِ مِثْلَهَا

« Tout musulman qui formule une invocation qui ne porte pas sur un péché ou une rupture des liens de parenté, Allah lui accorde par le biais de celle-ci une de ces trois choses : soit Il lui donne rapidement ce qu’il a demandé, ou Il lui réserve (le fruit de) cette invocation dans l’Autre Monde ou Il éloigne de lui (à la place de ce qu’il a demandé) un mal équivalent. » (Mousnad Ahmad)

Il ne faut donc en aucun cas désespérer de la Miséricorde divine et arrêter les invocations. Le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) disait :

 يُسْتَجَابُ لأحَدِكُمْ مَا لَمْ يَعْجَلْ يَقُولُ دَعَوْتُ فَلَمْ يُسْتَجَبْ لِى

« Votre (invocation peut être entendue et) acceptée tant qu’il n’y a pas de précipitation (de votre part, c’est-à-dire) que vous vous mettiez à dire : « J’ai invoqué mais je n’ai pas été accepté » (et vous vous arrêtiez ainsi de faire des douâs).  (Sahîh oul Boukhâri)

***

A mes frères et sœurs qui ont réussi leurs examens,

Je tiens à vous féliciter pour ce succès. Et par rapport à celui-ci justement, je voudrai vous rappeler humblement deux choses :

  • Tout d’abord, ayez l’humilité et la conscience de tout ramener à la grâce d’Allah et remerciez-Le du mieux que vous pouvez pour l’heureux événement que vous venez de connaître et qui vous réjouit tant. Dites vous bien que, si vous avez réussi aujourd’hui, c’est bien parce que Votre Seigneur et Créateur Miséricordieux en a voulu ainsi : les efforts et le travail que vous avez fournis sont les causes apparentes de ce succès. Mais, au fond, la réalité est celle qui est exprimée en ces termes dans le Qour’aane :

 وَمَا بِكُمْ مِنْ نِعْمَةٍ فَمِنَ اللَّهِ ثُمَّ إِذَا مَسَّكُمُ الضُّرُّ فَإِلَيْهِ تَجْأَرُونَ

« Tout bienfait que vous avez (est un don qui) vient d’Allah. Et lorsque vous êtes frappés par un malheur, c’est Lui que vous implorez. » (Sourate 16 / Verset 53)

  • Comme vous êtes avant tout redevable à Allah de cette faveur, la pire des réactions de votre part serait que vous vous détourniez de Lui et que vous vous mettiez à mépriser Sa Parole et Ses enseignements, en allant par exemple fêter ce succès dans Sa désobéissance et en commettant des péchés… Comme il m’est déjà arrivé de le répéter en plusieurs fois, rapportée à une échelle humaine, une telle attitude serait comparable à celle d’une personne qui reçoit un présent d’autrui et qui, pour le remercier, ne trouve rien de mieux à faire que de lui balancer ledit cadeau au visage… Comment pouvons-nous adopter envers Allah, le Seigneur des Mondes, un comportement que nous ne serions pas prêts à tolérer entre nous ?

Je me permets d’ouvrir ici une parenthèse pour faire un triste constat : emportés par l’ivresse des désirs et des plaisirs, le nombre de nos frères et sœurs qui n’opposent plus de résistance à des péchés aussi graves que le zinâ ne cesse de croître. Et cet état de fait est profondément lié à une chose : l’oubli de ce que le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) appelait justement le « hâdhim oulladh-dhât » (destructeur des plaisirs), la mort… Nous sommes de moins en moins conscients que, pour chacun nous, tout peut s’arrêter d’un moment à l’autre. Pourtant, ce ne sont pas les occasions qui manquent pour une telle prise de conscience : nous sommes régulièrement témoins de ces accidents ou de ces maladies qui s’emparent de nos frères et sœurs, jeunes ou moins jeunes, et les arrachent ainsi de leurs proches et de tout ce(ux) qui leur étaient cher. Si nous voulons trouver la force de nous opposer à la tentation du mal et du péché, il est plus que nécessaire que l’on réalise que la mort ne touche pas seulement les autres : nous comptons tous parmi ses cibles. Et personne, ici présent, ne sait avec certitude si le temps qui lui reste à vivre se chiffre en années, en mois, en jours, en heures ou en secondes…

En tous les cas, mes jeunes frères et sœurs qui avez été reçus à vos différents examens, plus que jamais, il vous faut aujourd’hui témoigner votre reconnaissance et votre gratitude à Allah. N’oubliez pas que, au fond, vous ne venez de franchir qu’une simple étape et qu’il y a encore bien des défis et des épreuves qui vous attendent encore (que ce soit dans la poursuite de vos études, dans l’accès au monde professionnel, …). Et si vous désirez bénéficiez de l’assistance divine demain, c’est à présent qu’il faut agir. Les propos du Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) à ce sujet sont sans équivoque :

تَعَرَّفْ إلِى الله فِي الرخَاء يَعْرِفْكَ فِي الشَّدَّةِ

« Souviens toi d’Allah dans la prospérité (c’est-à-dire crains-Le, respecte les limites qu’Il a fixées et tes devoirs envers Lui) et Il se souviendra de toi dans la difficulté (c’est-à-dire qu’Il te protégera et te viendra en aide). »  (Mousnad Ahmad, avec les commentaires de Ibnou Radjab)

Dans un autre Hadith, il est dit :

مَن سَرَّهُ أنْ يَسْتَجِيبَ اللهُ له عند الشَّدَائِدِ والْكُرَبِ فَليُكْثِرِ الدُّعَاءَ في الرَّخَاءِ

 « Celui qui aimerait qu’Allah lui réponde dans les moments de détresse et de difficulté, alors qu’il multiplie les douâs dans la prospérité (et l’aisance). » (Sounan Tirmidhi – Qualifié de Hassan)

 ***

Mes jeunes frères et sœurs, d’une façon plus générale, je voudrai attirer votre attention à tous sur deux points supplémentaires :

  • Vous représentez l’avenir de notre communauté… et, à ce titre, il est plus qu’essentiel que vous travailliez et fassiez des efforts pour développer au mieux vos connaissances et élargir vos compétences. Mais il est également important que vous soyez animés par de bonnes intentions : à travers les études que vous allez poursuivre encore pendant quelques années Incha Allah, l’obtention de diplômes suivi d’un bon emploi ne doit pas constituer votre seul objectif. Il vous faut aller bien au-delà et faire l’intention, dès à présent, de mettre aussi vos compétences au service de la communauté musulmane, et, dans une plus large mesure, au service l’humanité entière. Le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) disait :

خير الناس أنفعهم للناس

« Le meilleur des gens est celui qui est le plus bénéfique aux autres. » (Mousnad ouch Chihâb)

Malheureusement, ce que l’on constate aujourd’hui, c’est que les membres de notre communauté –et plus particulièrement nos jeunes- ne s’engagent pas suffisamment dans les actions qui servent l’intérêt général, alors que celles-ci sont pourtant des œuvres très méritoires. Je me souviens qu’il y a quelques années, un conférencier de passage avait évoqué une excellente initiative qui avait été entreprise dans une grande ville de Belgique : des groupes de jeunes musulmans avaient passé un après midi à nettoyer les rues autour de leur mosquée… un acte qui, en soi, a été présenté dans les Ahâdith comme étant une expression de foi

الإِيمَانُ بِضْعٌ وَسَبْعُونَ أَوْ بِضْعٌ وَسِتُّونَ شُعْبَةً فَأَفْضَلُهَا قَوْلُ لاَ إِلَهَ إِلاَّ اللَّهُ وَأَدْنَاهَا إِمَاطَةُ الأَذَى عَنِ الطَّرِيقِ وَالْحَيَاءُ شُعْبَةٌ مِنَ الإِيمَانِ

« L’îmân comprend plus de soixante dix (ou plus de soixante) branches. La meilleure d’entre elles est l’expression de l’unicité divine et la plus basse tient dans le fait d’éloigner les choses gênantes de la voie (publique). Et la pudeur est une branche importante de la foi. » (Sahîh Mouslim)

Durant les vacances scolaires qui débutent, il y a ainsi bien des actions qui peuvent être menées et qui, en très peu de temps, peuvent rapporter des récompenses considérables. C’est le cas par exemple :

o   des visites aux malades. Dans un Hadith, il est dit : « Tout musulman qui visite un autre musulman (malade) le matin a soixante dix mille anges qui prient en sa faveur jusqu’au soir. Et s’il le visite le soir, soixante dix mille anges prient en sa faveur jusqu’au matin. Et il aura (en sus de cela) un jardin au Paradis. » (Tirmidhi)

o   de l’assistance aux personnes qui sont le besoin. Le Messager d’Allah (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) disait : « Allah assiste Son serviteur tant que celui-ci aide son frère. » (Sahîh Mouslim)

o  du nettoyage de la mosquée. Il est rapporté qu’à l’époque du Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam), il y avait une femme qui balayait la masdjid. Ne la voyant pas un jour, le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) s’enquit à son sujet. On lui apprit qu’elle était morte. Le Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) dit alors : « Pourquoi ne m’avez-vous pas averti ? » Il semblerait qu’ils avaient minimisé sa fonction. Il (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) demanda alors qu’on lui indique sa tombe et il alla prier sur celle-ci. Puis il (sallallâhou ‘alayhi wa sallam) dit : « Ces tombes sont pleines d’obscurité et Allah les illumine par la prière que j’accomplis sur celles-ci. » (Boukhâri et Mouslim)

  • N’oubliez pas que le stress que vous pourrez ressentir lors des examens que vous passez dans ce monde ne représentent rien face à la tension à laquelle nous aurons à faire face aux épreuves de l’Autre Monde… des épreuves qui seront initiées notamment par le « grand huit »… non pas l’attraction foraine… mais les huit grandes questions qui auront un impact déterminant sur notre salut dans le Âkhirah :

·        Qui est Ton Seigneur ?

·        Quel est ta religion ?

·        Qui est cet homme ? (au sujet du Prophète Mouhammad (sallallâhou ‘alayhi wa sallam))

Comment as-tu passé ta vie ?

·        As-tu agi conformément à tes connaissances ?

·        D’où as-tu acquis tes biens ?

·        Comment les as-tu dépensés ?

·        Dans quoi as-tu usé ton corps ?

Et si les examens que nous passons ici-bas gardent, au fond, des conséquences limitées et surtout réversibles, il n’en sera pas de même là-bas : un simple passage au dessus de l’Enfer suffira pour faire oublier tout ce qu’on aura pu connaître comme confort et plaisir dans ce monde. (Sens d’un Hadith présent dans le Mousnad de l’Imâm Ahmad)

Et pour pouvoir réussir dans l’Autre Monde, ce ne sont pas quelques mois ou quelques années, mais c’est bien une vie entière de préparation dont nous avons besoin… une vie entière où il faudra constamment essayer de concilier nos efforts visant à satisfaire nos besoins matériels avec nos activités spirituelles visant nous rapprocher chaque jour un peu plus d’Allah.

Wa Allâhou A’lam !