Le mois de Cha’bân a débuté: un humble rappel à cette occasion…
Bismillâhir Rahmânil Rahîm
Assalâmoualaïkoum wa Rahmatoullâhi wa Barakâtouh
Chers frères et sœurs,
A l’occasion du début du mois de Cha’bân et en vue de l’arrivée très prochaine du mois de Ramadhân, j’ai pensé qu’il serait peut être profitable de partager avec vous les quelques lignes suivantes (extraites d’un cours de Hadith).
Incha Allah, celles-ci peuvent constituer pour nous tous -moi-même en premier- un humble rappel et contribuer ainsi à notre préparation spirituelle pour le mois de Ramadhân, le but étant, bien entendu, que le moment venu, Incha Allah, nous profitions au mieux de ces jours bénis.
Qu’Allah nous garde sur le Droit Chemin et nous accorde l’opportunité de toujours agir en bien, en restant attachés aux enseignements de la Révélation et en suivant le modèle du Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam).
Âmine
On peut lire dans le Qour’aane les propos suivants qui furent adressés par Allah à chaytân:
« Excite par ta voix ceux d’entre eux que tu pourras, rassemble contre eux ta cavalerie et ton infanterie, associe-toi à eux dans leurs biens et leurs enfants et fais-leur des promesses ». Or, le Diable ne leur fait des promesses qu’en tromperie. Quant à Mes serviteurs, tu n’as aucun pouvoir sur eux. Et ton Seigneur suffit pour les protéger !
(Sourate 17 / Verset 64-65)
Ce verset contient des indications par rapport aux principales voies utilisées par chaytân et ses alliés pour exercer son pouvoir sur l’être humain et l’égarer ainsi du Droit Chemin… Ils peuvent ainsi agir par:
– le biais de ce que l’homme perçoit à travers ses organes sensoriels (« Excite par ta voix… »),
– l’effet néfaste de ses actes de désobéissance (« …rassemble contre eux ta cavalerie et ton infanterie… »; selon la majorité des commentateurs du Qour’aane, toux ceux qui se meuvent en désobéissant à Allah composent la cavalerie et l’infanterie sataniques…) 1,
– l’intermédiaire des pulsions naturelles qui l’habitent, des qualités innées qui composent son caractère et des sentiments qu’il développe par rapport à sa propre personne ou à ce(ux) qui l’entoure(nt) (« …associe-toi à eux dans leurs biens et leurs enfants… »),
– des insinuations adressées directement à sa conscience et à son esprit (« …fais-leur des promesses »). Chaytân peut ainsi s’infiltrer et accéder au cœur humain par des voies internes ou externes, apparentes ou dissimulées. D’où la nécessité pour le croyant de faire preuve constamment d’une vigilance accrue par rapport aux multiples assauts de son ennemi juré, dont le Qour’aane cite les propos en ces termes:
« Puisque Tu m’as mis en erreur, dit [Satan], je m’assoirai pour eux sur Ton droit chemin, puis je les assaillirai de devant, de derrière, de leur droite et de leur gauche. Et, pour la plupart, Tu ne les trouveras pas reconnaissants. »
(Sourate 7 / Versets 16 et 17)
Le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) avait clairement averti les Compagnons (radhia Allâhou anhoum) à ce sujet. Abdoullâh Ibn Mas’oûd (radhia Allâhou anhou) raconte: Le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) traça pour nous une ligne et dit: « Ceci, c’est la voie d’Allah. » Puis il traça plusieurs autres lignes à droite et à gauche de la première, après quoi il affirma: « Celles-ci, ce sont (d’autres) voies, et et sur chacune d’entre elle se trouve un chaytân qui invite vers elle. » Et il récita (le verset coranique suivant): « Et voilà Mon chemin dans toute sa rectitude, suivez-le donc; et ne suivez pas les sentiers qui vous écartent de Sa voie. Voilà ce qu’Il vous enjoint. Ainsi atteindrez-vous la piété. » (Réf: « Mousnad Ahmad » et « Sahîh Ibn Hibbân » – Authentifié par Ibn Hibbân r.a. et qualifié de « Hassan » (bon) par Cheïkh Arnâoût r.a.)
Pour illustrer la perfidie et la sournoiserie de chaytân, l’Imâm Ghazâli r.a. relate dans son « Ihyâ oul Ouloûm » un récit qui se serait passé il y a de cela bien longtemps:
Il y avait un ermite parmi les israélites. chaytân envoûta un jeune fille puis insuffla dans l’esprit de ses proches que l’ermite détenait un moyen de guérison pour elle. Ils allèrent le trouver, mais il refusa de la prendre. Ils insistèrent jusqu’à ce qu’il accepte de la garder. Alors qu’elle se trouvait chez lui pour se faire soigner, chaytân vint l’influencer pour qu’il l’approche. Il continua à agir ainsi jusqu’à ce que l’ermite finisse par avoir des rapports avec elle. Celle-ci tomba alors enceinte de lui. chaytân vint à nouveau le trouver et lui insuffla: « A présent tu vas être déshonoré. Sa famille va venir te trouver (et te faire payer pour ce que tu as fait)… Tue-là. S’ils te questionnent à son sujet, répond leur: Elle est morte ! » L’ermite la tua et l’enterra. chaytân alla auprès de la famille de la jeune fille et leur informa secrètement que l’ascète avait mis enceinte leur fille, l’avait tuée et enterrée. Ceux-ci vinrent le voir et le questionnèrent. Il répondit qu’elle était morte. Ils le saisirent alors afin de le tuer, (appliquant le talion pour venger) le meurtre de leur fille. chaytân vint à ce moment auprès de l’ermite et lui dit: « C’est moi qui l’avait envoûté et c’est toujours moi qui ai informé secrètement à ses proches (tout ce qui s’était passé). Obéis moi et tu seras sauvé. Je te permettrai de les échapper. » L’ermite demanda: « En quoi dois-je t’obéir ? » Il dit: « Prosterne toi devant moi en deux fois. » Il le fit. chaytân lui dit alors: « Je te désavoue… » C’est bien celui-là même au sujet duquel Allah dit: « (…) Ils sont semblables au Diable quand il dit à l’homme : « Sois incrédule ». Puis quand il a mécru, il dit : « Je te désavoue car redoute Allah, le Seigneur de l’Univers. »(Réf: Ibn Abid Dounyâ dans « Makâyid ouch chaytân », Hâkim dans son Moustadrak le rapporte aussi sous forme de Hadith Mawqoûf (suspendu) de Ali (radhia Allâhou anhou) et l’authentifie…)
Ce qui doit être souligné ici, c’est que ce qui a constitué le point de départ de toutes les dérives et les évènements horribles qui vont se succéder était un acte dont on ne soucierait pas outre mesure de la gravité en apparence: Tout va partir de l’acceptation par l’ermite de garder la jeune fille pour la soigner… Et il est tout à fait possible d’imaginer que, à ce moment, dans son esprit, il considérait son geste comme constituant une bonne œuvre, car visant à venir en aide à des gens éprouvés… Pourtant, il est loin de se douter alors ce qui l’attend, et, surtout, comment la suite des évènements va totalement échapper à son contrôle… Telles sont les ruses de chaytân. Qu’Allah nous en préserve tous. Âmine ! Ce n’est pas sans raison que le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) disait en ce sens que celui qui s’aventure à trop s’approcher des limites fixées par Allah, peu ne s’en faut qu’il les transgresse et sombre ainsi dans l’interdit…
Il serait judicieux, ici, de rappeler quelques unes des portes internes -en ce sens qu’elle sont liées aux pulsions et aux sentiments humains- « favorites », celles qui sont le plus fréquemment employées par chaytân pour arriver à imprégner le cœur de l’homme de son influence maléfique, et ce, suivant l’exposé qu’en fait Al Ghazâli r.a. toujours.
Il s’agit de:
– La colère: Sa violence peut en effet faire perdre à l’être humain tout contrôle de soi, offrant ainsi toute latitude à chaytân pour qu’il se joue de lui et le pousse à faire ce qu’il désire…
– Le désir: Non maîtrisé, celui-ci peut conduire l’homme à réaliser des péchés très graves, depuis le regard malsain jusqu’à la fornication, en passant par les pensées et les fantasmes illicites…
– La jalousie et l’avidité: Deux inclinaisons qui peuvent carrément aveugler et assourdir ceux qui en sont touchés et leur faire oublier leur sens des responsabilités. C’est bien la jalousie et l’envie qui provoquèrent la perte et la malédiction d’Ibliss en l’empêchant de se prosterner devant Âdam (alayhis salâm). Et c’est bien ce qu’on pourrait considérer comme étant une certaine avidité qui joua un rôle déterminant dans l’erreur commise par Âdam (alayhis salâm) et son épouse, les poussant à manger du seul arbre qu’Allah leur avait pourtant clairement interdit de s’approcher…
– L’amour excessif des choses matérielles, la crainte de la pauvreté et l’avarice: chaytân emploie ces sentiment pour influencer l’être humain, développant et entretenant sans cesse en lui un mode de vie basé sur des critères purement matérialistes. L’homme arrive ainsi à gaspiller toute sa précieuse existence à courir derrière des objectifs qu’il n’atteindra jamais -car il ne lui sera pas possible de satisfaire l’ensemble de ses désirs matériels en ce monde. Pour illustrer cette triste réalité, on peut citer l’exemple de la personne qui obtient tout à coup, sans qu’il ne s’y attende, une centaine d’euros: Dans un tel cas, souvent, ce qui se produit immédiatement, c’est que son cœur se retrouve assailli par l’envie de satisfaire de multiples désirs matériels… dont chacun demande au moins une somme équivalente à celle qu’elle a obtenue. Du coup, ce qu’elle a ne lui suffit plus déjà et elle ressent le besoin d’avoir encore plus d’argent… Ainsi, lui, qui, il y a quelques instants seulement avait un cœur serein et ne ressentait aucun besoin matériel particulier se retrouve tout à coup dans une spirale de besoin. Et s’il ne prend pas garde et ne s’en extirpe pas, la volonté de satisfaire ses nouveaux et supposés besoins accapareront tout son temps et ne lui en laisseront même plus suffisamment pour pouvoir remplir ses réels devoirs -ceux envers Son Créateur et les êtres qui l’entourent…
– Le désir ardent de toujours plaire aux gens -et non au Créateur: Une telle ambition a pour conséquence directe de développer dans le cœur de celui qui les porte des maladies spirituelles très graves, telles que l’ostentation… Les personnes qu’il cherche à plaire deviennent ainsi comparables à des divinités: En effet, tous ses faits et gestes, ainsi que son comportement et son attitude se trouvent constamment orientés par ce désir qui l’anime, avec toutes les conséquences néfastes que cela sous entend -la moindre d’entre elles étant qu’il sombrera dans la plus vile flagornerie (moudâhanah), n’osant plus ainsi s’acquitter de son devoir de musulman d’ordonner le bien et d’empêcher le mal, de peur de froisser ceux qu’il vénère tant…
– La précipitation: Le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) affirmait clairement que « la précipitation vient de chaytân… » (Hadith rapporté par Tirmidhi et qualifié de « Hassan » (bon).) Celui qui ne prend pas bien le temps de réfléchir avant d’agir diminue (partiellement ou totalement) le contrôle de sa raison sur ses décisions: Rien d’étonnant, dès lors, à ce qu’il devienne une proie de choix pour les insinuations sataniques.
– La volonté de dénigrer ses opposants et le sectarisme: L’esprit de contradiction est une disposition présente chez la plupart des gens, à des échelles différentes cependant. C’est justement ce trait de la personnalité que, souvent, chaytân arrive à exploiter de façon perverse et vicieuse: Ainsi, sur les questions liées, d’une façon ou d’une autre, à des aspects religieux, chaytân donne l’illusion à l’être humain que les critiques qu’il formule à l’égard d’autrui sont tout à fait justes et qu’elles contribuent à établir la justice… Résultat: Plutôt que de prendre conscience de ses manquements et de penser à se repentir pour ses propres méfaits et ses péchés, il retire de son attitude sectaire et de son déni constant d’autrui un sentiment de devoir accompli…
– L’attachement aux sujets de polémiques et aux divergences: C’est encore là une voie qu’emploie chaytân pour détourner l’être humain de l’essentiel, celui de sa réforme personnelle pour une meilleure soumission envers Allah. Ce n’est pas sans raison que le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) avait énoncé l’énorme mérite lié à l’abandon de la dispute, même lorsqu’on a raison…
Voici donc quelques uns des principaux accès « internes » utilisés par chaytân exercer son influence maléfique sur le cœur humain. A nous, à présent, de redoubler notre vigilance et de faire de notre mieux pour obstruer ces « voies » employées par chaytân, et ce, en multipliant les exercices de réforme spirituels et les œuvres pies, mais aussi et surtout en implorant l’Aide et l’Assistance d’Allah.
Wa Allâhou A’lam !
Et Dieu est Plus Savant !
Wassalâmoualaïkoum wa Rahmatoullâhi wa Barakâtouh
1- Voir à ce sujet les commentaires d’Al Qourtoubi r.a. dans son Tafsîr. Au passage, on peut souligner que c’est là une indication qu’il existe une véritable inter-action entre le cœur et les actions humaines: Si al qalb a une influence indiscutable sur ces dernières, en retour, celles-ci imprègnent également le cœur de certains effets, positifs ou négatifs…
- Par Mouhammad Patel
- Le 28 septembre 2003