Evitons les polémiques…
Il existe, au sein du Qour’aane et des Hadiths rapportés du Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam), de nombreuses références qui nous indiquent que l’ensemble des faits et gestes de chaque individu sur cette terre sont soigneusement inscrits.
Et chacun aura a répondre, le Jour Final, des actes qu’il a fait durant son existence. Allah nous avertit dans le Qour’aane de ce qui se passera alors:
Et le jour où les ennemis d’Allah seront rassemblés en masse vers le Feu… Puis on les poussera [dans sa direction].
Alors, quant ils y seront, leur ouïe, leurs yeux et leurs peaux témoigneront contre eux de ce qu’ils œuvraient.
Ils diront à leur peaux : « Pourquoi avez-vous témoigné contre nous ? » Elles diront : « C’est Allah qui nous a fait parler, Lui qui fait parler toute chose. C’est Lui qui vous a créés une première fois et c’est vers Lui que vous serez retournés ».
Vous ne pouvez vous cacher au point que ni votre ouïe, ni vos yeux et ni vos peaux ne puissent témoigner contre vous. Mais vous pensiez qu’Allah ne savait pas beaucoup de ce que vous faisiez.
(Sourate 41 / Versets 19 à 22)
Il faut cependant reconnaître que le croyant, s’il a toujours plus ou moins conscience des conséquences de ses actions, il n’est pas rare de constater qu’il porte beaucoup moins attention aux propos qu’il tient… Pourtant, là encore, le Qour’aane nous apprend que chaque mot que nous prononçons est immédiatement consigné, que ce soit des paroles en bien ou en mal. Et le Jour du Jugement Dernier, nous aurons également à répondre de ces propos. Allah dit:
Nous avons effectivement créé l’homme et Nous savons ce que son âme lui suggère et Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire
quand les deux recueillant, assis à droite et à gauche, recueillent.
Il ne prononce pas une parole sans avoir auprès de lui un observateur prêt (à l’inscrire).
(Sourate 50 / Versets 16 à 18)
Anou Houraïra (radhia Allâhou anhou) rapporte qu’il a entendu ces propos du Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam):
« Certes, le serviteur peut prononcer un mot sans y prendre garde, mot qui (pourtant) lui vaudra le Contentement d’Allah et grâce auquel Allah l’élèvera de plusieurs degrés; mais le serviteur peut aussi laisser échapper une parole sans y prendre garde, parole qui provoquera la Colère divine et lui vaudra d’être précipité en Enfer. »
(Boukhâri)
Dans une autre Tradition authentique rapportée par Bilâl Ibn oul al Hârith (radhia Allâhou anhou), voici les propos qui sont attribués au Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam):
« Certes l’homme peut prononcer une parole agrée d’Allah sans en mesurer toutes les conséquences et pour laquelle Allah lui accordera Son Agrément jusqu’au Jour où il Le rencontrera. Et l’homme peut aussi prononcer une parole suscitant le Courroux divin sans en mesurer toutes les conséquences et qui lui vaudra le Courroux divin jusqu’au Jour où il Le rencontrera. »
(Tirmidhi, Al Mouwatta)
C’est ce qui explique notamment pourquoi, en Islam, une véritable « éthique du langage » (si l’on peut s’exprimer ainsi…) a été élaborée. Et le respect de cette éthique est d’autant plus important pour les croyants et les croyantes, qu’en matière de conduite sociale, la nature des propos échangés entre les individus se révèle être l’un des éléments qui conditionne le plus la qualité des relations mutuelles. D’où les exhortations répétées du Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) portant sur la grande vigilance que devrait témoigner chacun et chacune à ce sujet.
On apprend ainsi par le biais de certains Hadiths que le Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) n’appréciait pas que l’on réponde à des propos déplacés par d’autres, similaires. Aïcha (radhia Allâhou anha) raconte, qu’une fois, des juifs vinrent visiter le Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) et dirent (en entrant): « As sâmou alaykoum ! « (« Que la mort s’abatte sur vous ! » En fait, en raison de leur haine et de leur animosité envers le Messager d’Allah (sallâllâhou alayhi wa sallam), au lieu de prononcer la formule habituelle de salutation, « Assalâmou alaykoum », ils jouaient sur les mots et remplaçaient ceux-ci par des propos malsains et des imprécations…) Aïcha (radhia Allâhou anha) répondit alors: « (Qu’elle s’abatte) sur vous ! Et que la malédiction et le courroux d’Allah tombent sur vous ! » Le Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) dit alors: « Doucement, Ô Aïcha ! Adopte (plutôt) la douceur et évite la rudesse et la grossièreté. » (Boukhâri).
N’oublions pas non plus les directives qu’Allah adressa à Moussa (alayhis salâm), alors qu’il était envoyé pour prêcher la vérité à Pharaon:
« Allez vers Pharaon : il s’est vraiment rebellé. Puis, parlez-lui gentiment (littéralement: « Dites-lui des paroles douces »). Peut-être se rappellera-t-il ou [Me] craindra-t-il ? »…)
(Sourate 20 / Versets 43 et 44)
On ne peut nier le fait que, souvent, les conflits qui surgissent (et qui durent…) entre les personnes sont provoqués par un manque d’attention dans les propos prononcés. C’est d’ailleurs ce qui contribue à faire de la langue l’un des organes par l’intermédiaire duquel de très nombreux péchés sont commis. Le Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) ne disait-il pas, pour nous faire prendre conscience de ceci, « celui qui me garantit ce qu’il a entre les mâchoires (c’est à dire sa langue) et ce qu’il a entre ses jambes, je lui garantis le paradis. » (Boukhâri et Mouslim) ?…
On comprend dès lors pourquoi le Messager d’Allah (sallâllâhou alayhi wa sallam) recommandait avec tant d’insistance aux croyants et aux croyantes d’éviter les paroles futiles et inutiles et de préférer à celles-ci le silence. On devrait souvent méditer sur les conseils qu’il (sallâllâhou alayhi wa sallam) avait donné à Ouqba Ibné Âmir (radhia Allâhou anhou), qui lui avait questionné au sujet de la réussite… Il lui avait répondu: « Retiens ta langue, demeures chez toi le plus possible (littéralement: « que ta maison te contienne ») et pleures sur tes fautes. » (Tirmidhi – Hadith fiable)
Bien sûr, dans le cas d’une personne qui désire dire du bien, le silence ne sera pas préférable. En effet, la bonne parole a été qualifiée d’aumône par le Prophète Mouhammad (sallâllâhou alayhi wa sallam) dans un Hadith cité dans le Sahîh Boukhâri.
Notre « éthique du langage » s’alimente également de l’ensemble des directives qui ont été énoncées dans le Qour’aane et la Sounnah concernant les propos que le croyant et à la croyante doit nécessairement se préserver…
Parmi ceux-ci, il y a les disputes et les discussions violentes (« djidâl »), les polémiques (« mirâ' ») et les querelles (« khousoûmah »). L’Imâm Adh Dhahabi r.a., dans son ouvrage traitant des péchés majeurs, « Al Kabâïr », consacre un chapitre entier pour dénoncer la gravité et les effets néfastes des polémiques et des disputes. Il y rapporte notamment les propos de l’Imâm Nawawi r.a. à ce sujet, qui dit:
« Sache que la discussion peut aussi bien être fondée sur un droit que sur de faux arguments. Allah dit (en faisant allusion au premier type de discussion): « Ne discute avec les Gens du Livre que de la manière la plus courtoise » – Il dit aussi: « Discute avec eux de la meilleure manière. » (et au sujet du second type de discussions,) Allah dit: « Ne discutent au sujet des Signes d’Allah que ceux qui ont mécru. » (L’Imâm Nawawi r.a.) dit: « Si la discussion a pour objet la connaissance de la vérité et son affirmation, dans ce cas, elle est louable. Mais si elle faite pour repousser la vérité ou s’il s’agit d’une discussion âpre avec ignorance, elle est méprisable. »
Ensuite, l’Imâm Dhahabi r.a. relate les propos de l’Imâm Ghazâli r.a. visant à désigner les querelles qui sont condamnables:
« En vérité, le mépris et le blâme s’appliquent pour celui qui se querelle en tort, sans aucune connaissance (…) Est aussi condamnable (l’attitude de) celui qui se dispute pour récupérer son droit en manifestant de l’acharnement et de la violence, en forgeant des mensonges, en lésant son vis-à-vis et en le dominant. Il en est de même pour celui qui mêle dans sa discussion des propos blessant et de nature à nuire, alors qu’il n’en a nullement besoin pour récupérer son droit ou qui ne se dispute que par entêtement, afin d’avoir le dessus sur son opposant et le briser. C’est donc (tout) cela qui est méprisable. » Il continue un peu plus loin en ces termes: « Et la discussion est de nature à développer l’animosité et à attiser la colère. Et lorsqu’il en est ainsi, la rancune se crée entre les deux personnes concernées, à tel point que l’un se met à se réjouir du malheur de l’autre et il s’attriste lorsque son opposant est joyeux. Il délie alors sa langue pour salir l’honneur de la partie adverse. Celui qui se dispute se trouve donc confronté à tous ces maux, dont le moindre est la préoccupation permanente du cœur, à tel point que même lorsqu’il se trouve en prière, son esprit est troublé par cette discussion et cette polémique. Il ne peut ainsi trouver la sérénité (ou la stabilité). La dispute âpre est donc la source du mal, tout comme la querelle. C’est la raison pour laquelle l’homme ne devrait ouvrir la porte de la discussion qu’en cas de nécessité absolue. »
Après cette longue citation, l’Imâm Dhahabi r.a. cite quelques Traditions se rapportant à cela, et parmi celles-ci, on trouve les propos suivants rapportés par Ibné Abbâs (radhia Allâhou anhou):
« Il te suffit comme péché que d’être constamment en train de te quereller. »
Qu’Allah nous préserve tous d’une telle attitude ! Âmine
Je conclurai avec un humble et ultime rappel: N’oublions pas que cette vie qui nous a été accordée représente pour nous le capital que nous devrons nécessairement faire fructifier afin de trouver le succès éternel dans la Vie Future. Ne gaspillons donc pas ce précieux « capital temps » (dont nous aurons à répondre devant Notre Créateur) dans des polémiques et des discussions âpres et inutiles, qui n’augmentent en rien notre foi et ne font que porter atteinte à notre spiritualité. Utilisons-le plutôt avec intelligence et discernement, afin de répandre le bien autour de nous.
Qu’Allah protège et renforce notre foi et nous guide vers les actes qu’Il agrée. Âmine
Bismillâhir Rahmânil Rahîm
« Par le Temps !
L’homme est certes, en perdition,
sauf ceux qui croient et accomplissent les bonnes œuvres, s’enjoignent mutuellement la vérité et s’enjoignent mutuellement l’endurance.«
Wa Allâhou A’lam !
Et Dieu est Plus Savant !
- Par Mouhammad Patel
- Le 15 septembre 2001