Les oulémas des différentes écoles de jurisprudence musulmanes s’accordent pour considérer que, en hiver[1], et, il est recommandé d’accomplir la salât oudh dhouhr au tout début de son heure, c’est-à-dire rapidement après le zawâl. [2] Cet avis consensuel va dans le sens de la pratique du Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) rapportée notamment dans les deux narrations suivantes :
عنْ عَائِشَةَ قَالَتْ مَا رَأَيْتُ أَحَدًا كَانَ أَشَدَّ تَعْجِيلًا لِلظُّهْرِ مِنْ رَسُولِ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ وَلَا مِنْ أَبِي بَكْرٍ وَلَا مِنْ عُمَرَ
Aïcha (radhia Allâhou anhâ) raconte : « Je n’ai vu personne hâter (la prière d’) adh dhouhr autant que le Messager d’Allah (sallallâhou alayhi wa sallam), ni autant que Abou Bakr (radhia Allâhou anhou) et Oumar (radhia Allâhou anhou). » (Sounan Tirmidhi – la chaîne de transmission de ce rapport présente des failles –dhaïf)
عَنْ الزُّهْرِيِّ قَالَ أَخْبَرَنِي أَنَسُ بْنُ مَالِكٍ أَنَّ رَسُولَ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ صَلَّى الظُّهْرَ حِينَ زَالَتْ الشَّمْسُ
Az Zouhriy (rahimahoullâh) dit : Anas (radhia Allâhou anhoum) m’a informé que le Messager d’Allah (sallallâhou alayhi wa sallam) priait adh dhouhr lorsque le soleil eut décliné. (Authentique, cité également par Al Boukhâri)
La détermination du moment le plus approprié pour faire adh dhouhr en été fait cependant l’objet d’une légère divergence :
- selon les oulémas hanafites, pendant cette période de l’année, il est préférable de retarder l’accomplissement de la salât jusqu’à ce que l’intensité de la chaleur ait bien diminué.[3] L’avis des hambalites va dans le même sens que celui des hanafites sur ce point.
- il existe quelques divergences entre les mâlékites sur cette question. Néanmoins, il semble bien que, selon l’opinion la plus répandue dans ce madh-hab, il est préférable de prier le dhohr au début de l’heure aussi bien en été qu’en hiver. Cependant, lorsqu’il fait très chaud, il est mieux de retarder quelque peu (jusqu’au quart ou la moitié de l’heure prescrite) l’accomplissement de la salât oudh dhouhr. Suivant le rapport de Ibnou Rouchd (rahimahoullâh), un des avis rapportés de l’Imâm Mâlik (rahimahoullâh) indique que cette recommandation concerne la prière qui est faite en congrégation et non celle qui est accomplie de façon isolée, chez soi.
- les châféïtes soutiennent pour leur part qu’il est préférable à ceux qui résident dans des pays chauds de ne pas accomplir la salât oudh dhouhr dès le début de son heure en période de grande chaleur, lorsque la prière est accomplie en groupe et que les gens doivent se déplacer de loin pour venir prendre part à celle-ci. Dans ce cas, il est effectivement moustahab de prier adh dhouhr après que le soleil ait décliné un peu et que les murs projettent suffisamment d’ombre pour qu’on puisse y circuler. Quant à ceux qui font la salât seuls ou qui prennent part à la prière en groupe sans avoir à se déplacer de loin, il est préférable, selon les châféïtes toujours, d’accomplir la prière de dhouhr dès le début de son heure.
Les savants qui recommandent de retarder un peu l’accomplissement du dhohr en été se fondent notamment sur les Ahâdîth suivants :
عَنْ أَبِي هُرَيْرَةَ قَالَ قَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ إِذَا اشْتَدَّ الْحَرُّ فَأَبْرِدُوا عَنْ الصَّلَاةِ فَإِنَّ شِدَّةَ الْحَرِّ مِنْ فَيْحِ جَهَنَّمَ
Abou Houreïrah (radhia Allâhou anhou) relate (que) le Messager d’Allah a dit : « Lorsque la chaleur est forte, (attendez que celle-ci se soit) atténuée pour prier, car l’intensité de la chaleur résulte de l’expansion de l’Enfer. » [4](Hadith authentique, cité par Boukhâri et Mouslim)
عَنْ أَبِي ذَرٍّ أَنَّ رَسُولَ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ كَانَ فِي سَفَرٍ وَمَعَهُ بِلَالٌ فَأَرَادَ أَنْ يُقِيمَ فَقَالَ أَبْرِدْ ثُمَّ أَرَادَ أَنْ يُقِيمَ فَقَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ أَبْرِدْ فِي الظُّهْرِ قَالَ حَتَّى رَأَيْنَا فَيْءَ التُّلُولِ ثُمَّ أَقَامَ فَصَلَّى فَقَالَ رَسُولُ اللَّهِ صَلَّى اللَّهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ إِنَّ شِدَّةَ الْحَرِّ مِنْ فَيْحِ جَهَنَّمَ فَأَبْرِدُوا عَنْ الصَّلَاةِ
Abou Dharr (radhia Allâhou anhoum) raconte que le Messager d’Allah était en voyage (une fois), accompagné de Bilâl (radhia Allâhou anhou). Celui-ci voulut lancer l’appel (à la prière), mais le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) lui dit : « Laisse la chaleur diminuer. » Puis il (radhia Allâhou anhou) voulut lancer appeler (à la prière à nouveau) ; le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) lui répéta alors : « Laisse la chaleur diminuer pour (l’accomplissement d’)adh dhouhr. » Il (le narrateur) dit : (il resta ainsi à attendre) jusqu’à ce que nous vîmes l’ombre des collines (étendu sur le sol). Puis il lança l’appel et pria. Le Messager d’Allah (sallallâhou alayhi wa sallam) dit alors : « L’intensité de la chaleur résulte de l’expansion de l’Enfer ; accomplissez donc la salât après qu’elle se soit atténuée. »(Hadith authentique, cité par Boukhâri et Mouslim)
Diverses hypothèses ont été avancées pour tenter d’expliquer cette recommandation prophétique :
- selon certains, ce retard de la prière a pour but de faciliter le déplacement vers la mosquée et contribuer ainsi à ce que le plus grand nombre puisse accomplir la salât en groupe.
- selon d’autres, lorsque la chaleur est très intense, il est difficile de se concentrer durant la prière et d’accomplir celle-ci avec la dévotion voulue : c’est pour cette raison qu’il a été recommandé de ne pas faire la salât à ce moment.[5]
Wa Allâhou A’lam !
[1] Lorsque le ciel n’est pas nuageux (selon les hanafites et les hambalites). Réf : « Al Mawsoûat oul Fiqhiyah » – Volume 7 / Page 177
Selon l’auteur hanafite du « Marâqiy oul Falâh », la même règle s’applique durant l’automne et le printemps. Réf : « Marâqiy oul Falâh » – Page 119
[2] « Touhfat oul Ahwadhi » – Volume 1 / Page 483
[3] « Badâï ous Sanâï' » – Volume 1 / Page 322, « Al Mabsoût » – Volume 1 / Page 145, « Fiqh oul ‘Ibâdât ‘alal madh-hab ach châfi’iy » – Page 243, « Al Madjmoû' » – Volume 3 / Page 62, « Al Moughniy » – Volume 2 / Pages 35 à 38, « Al Fiqh oul Islâmiy » – Volume 1 / Pages 514-515, « Touhfat oul Ahwadhi »– Volume 1 / Pages 484 à 490, « Fiqh oul ‘ibâdât ‘alal madh-hab al mâlikiy » – Page 115, « Bidâyat oul Moudjtahid » – Volume 1 / Page 152, « Al Mawsoûat oul Fiqhiyâ » – Volume 7 / Page 177
[4] D’un point de vue scientifique, la fluctuation des températures est liée à des facteurs connus, comme la position géographique, le degré d’exposition au rayonnement solaire, l’intensité de ce dernier, l’altitude, l’importance de la pollution et de l’effet de serre, la présence de vents et leur force etc.
Les propos du Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) rapportés ici ne sont en aucune façon contredits par ces réalités scientifiques. En fait, ce Hadith indique simplement que, en sus des facteurs apparents qui expliquent l’intensité de la chaleur sur terre, il en existe un autre qui est, lui, lié au monde invisible : il s’agit de l’augmentation de volume et la dilatation de l’Enfer… « Touhfat oul Ahwadhi » – Volume 1 / Page 487, « Dars Tirmidhi » – Volume 1 / Page 408
[5] « Fath oul Moulhim » – Volume 2 / Page 198