L’ouvrage de l’Imam Malik r.a., « Al Mouwatta », a d’abord l’avantage d’être le livre le plus authentique a son époque après le Coran comme disait l’Imam Ach Châfi’i r.a., qui a vécu avant les auteurs des deux compilations de Hadiths authentiques (Boukhâri et Mouslim). L’Imam Malik r.a. était très strict en matière de transmission de Hadiths et les personnes de qui il acceptait les Traditions (« Ridjâl »), il les sélectionnait. C’est pourquoi, a l’exception d’un Cheikh (si je ne m’abuse), ses Chouyoukh (personnes de qui il tient ses Hadiths) valent mieux que ceux d’Al Boukhari r.a. et de Mouslim r.a.
Quant a ses chaînes de transmissions, il y en a certaines qui font partie de ce qu’on appelle « As-silsila Edhahabiyya » (La chaîne dorée), comme c’est le cas par exemple pour la chaîne qui se compose de « Malik, selon Nâfi’, selon Ibn Umar (radhia Allâhou anhou) ».
L’Imam Malik r.a. s’abstenait de rapporter les Hadiths de gens qui n’étaient pas de Médine. Il disait au sujet de gens de Al Koûfa par exemple: « Je les vois, lorsqu’ils viennent a Médine, ils rapportent de n’importe qui. Je me suis dit, ils doivent alors faire de même chez eux. » Et à Al Koûfa, bien qu’il y avait d’éminents savants de Hadiths comme Ach Cha’bi r.a., Al A’mash r.a., Shu’ba r.a., Sufyane ethawri r.a. et d’autres, mais c’était également le fief des fabricants de Hadiths et surtout des sectes chiites extrémistes qu’on appelait les « râfidites ». L’Imam Malik disait précisément « qu’avant, on frappait l’argent a Al Koufa… et maintenant on frappe les Hadiths là-bas ».
L’histoire de l’Imam Malik r.a. avec Ayub Assoukhtiyani r.a. est très parlante… Lorsque celui-ci venait a Médine, l’Imam Malik se présentait toujours pour écouter ses Hadiths; pourtant, il ne rapportait jamais de lui. Il disait bien: « Je ne lui reproche rien », malgré cela il s’abstenait du fait qu’il était de Al Koufa. Jusqu’à ce qu’il l’ait vu une fois rapporter un Hadith et éclater en sanglot… là il a commencé à rapporter de lui (n’oublions pas le respect qu’avait l’Imam Malik pour les Hadiths: Pour les enseigner, il faisait les ablutions, se faisait beau, s’asseyait avec beaucoup de respect et d’humilité et n’acceptait pas que quiconque le dérange pour parler à ce moment).
Voici donc pour ce qui est de la rigueur de l’Imam Malik quant a sa sélection des personnes de qui il rapporte des Hadiths. Il est à noter qu’il existe un épître de l’Imam Essuyuti r.a. qui est édité à la fin de son « Charh » (commentaire) d’Al Muwatta, où il fait une biographie des gens qui se trouvent dans les chaînes de transmission des Hadiths de cet ouvrage.
A noter encore que Al Mouwatta ne contient pas que des Hadith dont la chaîne de transmission est continue. Il contient aussi des « Marâssil » (c’est à dire des Traditions où il y a une rupture de la chaîne de transmission au niveau du « Sahabi » (Compagnon)). En effet, l’Imam Malik prend en compte les « Marâssil », bien que les savants du Hadith recensent ce genre de narrations comme « Dhaif » (faible). Cela dit, l’Imam Ibn Abd Al Barr r.a. -le grand Hâfidh (mémorisateur de Hadiths)de l’Andalousie-, qui était le Cheikh d’Ibn Hazm r.a. et qu’on surnommait le « Boukhâri » de Al Andalous, dans son excellent ouvrage « At-tamhid » (qui est un Charh d’Al Muwatta) a étudié tous les « Marâssil » qu’il contient et a réussi à les remonter jusqu’au Prophète Mouhammad (saw), à l’exception de deux ou trois je crois.
« Al Mouwatta » contient aussi des Hadiths avec des ruptures ailleurs dans la chaîne de transmission. A côté de cela, on peut également y trouver les dires des Compagnons (radhia Allâhou anhoum), des Tâbi’ine (la génération suivante) – la pratique des gens de Médine à l’époque constitue une source de législation importante chez l’Imam Malik- , ainsi que des avis juridiques.
C’est justement pour cette raison que l’on dit qu’en matière de Hadiths les deux ouvrages authentiques de Boukhâri et Mouslim viennent avant le « Mouwatta ». En effet, les auteurs de deux premiers ouvrages de référence n’ont retenu, eux, que des Hadiths dont la chaîne de transmission est continue… (à l’exception de ce qu’on appelle « Al Mouallaqat », qui sont des narrations dont la chaîne de transmission a été volontairement tronquée et dont uniquement la partie entre un rapporteur et le Prophète (sallallâhou alayhi wa sallam) a été gardée… Cette forme de narration, justifiée par certaines subtilités liées à la science des Hadiths, vise à bien faire ressortir que les Hadiths en question n’ont pas le même statut que les autres Hadiths rapportés dans l’ouvrage avec chaîne continue. On en trouve un certain nombre de « Mouallaqat » chez Al Boukhari et très peu chez Mouslim.)
Wa Allâhou A’lam !
Et Dieu est Plus Savant !