Description et déroulement du voyage
Important : Les règlements énoncés dans les lignes suivantes sont avant tout conforme à l’interprétation juridique de l’école hanafite.
Il faut savoir que les actes d’adoration qui sont directement liées à la Maison d’Allah sont au nombre de deux :
– Il y a d’abord la oumrah, la simple visite pieuse de la Ka’bah, qui peut se faire à n’importe quel moment de l’année, exception faite de cinq jours durant le mois de dhoul hidjjah, en l’occurrence, le jour de ‘arafah (9 dhoul hidjjah) et les ayâm tachrîq (10,11,12 et 13 dhoul hidjjah).
– Ensuite, il y a le hadj, le grand pèlerinage qui ne s’effectue que durant cinq jours de l’année (9,10,11,12 et 13 dhoul hidjjah).
En considérant la façon dont les rituels de la oumrah et du hadj peuvent être accomplis lors du voyage(séparément ou ensemble), il existe trois formes de pèlerinage différentes, chacun avec ses règlements particuliers et ses conditions propres. Néanmoins, la plupart de ceux qui vont accomplir le pèlerinage de l’étranger accomplissent le hadj tamattou’, qui consiste à effectuer les deux rituels (la oumrah, suivie du hadj)au cours d’un même voyage, en se mettant en deux fois en état de sacralisation (ihrâm) (une première fois pour accomplir seulement la oumrah, et une seconde fois pour le hadj uniquement). C’est justement la méthode d’accomplissement de ce type de hadj qui va être décrite dans les lignes suivantes Incha Allah, et ce, en suivant l’ordre chronologique des différents rituels qui la composent.
L’ihrâm…
Exactement comme la salât est initiée par un acte particulier (le takbîr tahrîmah) qui a pour effet d’interdire pendant un laps de temps défini à celui qui prie des actions et des attitudes qui sont en temps normal tout à fait licites, les rituels de la oumrah et du hadj sont également initiés par un acte dont la fonction est assez proche : Il s’agit de l’ihrâm. C’est là un état de sacralisation durant lequel s’appliquent un certain nombre de restrictions(détaillées par la suite).
– Où se mettre en état d’ihrâm ?
Le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) a imposé à tout musulman et toute musulmane qui ne réside pas sur la terre sacrée d’al haram ni dans les régions avoisinantes (al hillous saghîr)1–ce genre de personnes sont appelées âfâqî- et qui se rend à Makkah de se mettre en état d’ihrâm avant de dépasser certaines limites géographiques2, les mawâqît (singulier : mîqât).
Après le départ du Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) de ce monde et avec l’augmentation constante des voies empruntées par les musulmans pour se rendre à Makkah, le problème suivant se pose très rapidement : A quel moment celui qui se rend à la ville sainte sans passer par un des points déterminés par le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) doit-il se mettre en état de sacralisation ? Oumar (radhia Allâhou anhou) va énoncer un principe pour répondre à cette question : Il (radhia Allâhou anhou) dit en substance aux gens venant d’Iraq qu’ils devront se mettre en état d’ihrâm quand ils passeront, sur leur route vers Makkah, en un lieu qui se trouve au même niveau (c’est-à-dire que la distance séparant les deux points de la ville sainte est la même) que le mîqât qui leur est le plus proche, à savoir qarn oul manâzil.
C’est en considérant ce principe énoncé par Oumar (radhia Allâhou anhou) que les oulémas, par la suite, vont pouvoir tracer les contours de toute la zone qui ne doit pas être pénétrée par le âfâqi qui se rend à Makkah sans qu’il ne se soit mis au préalable en état d’ihrâm.
Pour les réunionnais qui vont accomplir le hadj, deux cas de figure différents peuvent se présenter :
– Certains se rendent à Madinah d’abord (directement ou via Djeddah). Ceux-ci doivent se mettre en état d’ihrâm en quittant la ville du Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam), étant donné que lemiqât fixé pour toute personne venant de cette direction se trouve juste à la sortie de la ville de Madinah(dhoul houleïfah –abyâr ali).
– D’autres se rendent d’abord à Makkah (directement ou via Djeddah). En ce qui les concerne, selon l’opinion de la grande majorité des oulémas, l’ihrâm doit être mis avant même d’arriver à Djeddah(environ 40 ou 45 minutes avant l’atterrissage3). En effet, selon ces oulémas, la ville de Djeddah est située bien à l’intérieur de la zone délimitée par les mawâqît : Arrivé sur l’aéroport, il est donc trop tard pour se mettre en état d’ihrâm.
Il est à noter qu’une minorité de oulémas ne partage pas cet avis : Selon eux, il est possible d’attendre d’être arrivé à Djeddah pour se mettre en état d’ihrâm.
Face à cette divergence, l’attitude la plus responsable à adopter est la suivante :
a) Il faut suivre le premier avis, et ce, pour au moins trois raisons :
1- C’est celui de la grande majorité des oulémas du monde. C’est aussi l’opinion retenue par l’Académie Islamique du Fiqh d’Arabie Saoudite (dont fait partie Moufti Taqui Outhmâni, illustre savant hanafite contemporain), comme en témoigne une résolution qu’elle a émise, après une de ses sessions d’étude sur la question, depuis plus d’une dizaine d’années.
2- C’est l’avis qui est soutenu par les arguments les plus probants : Il suffit pour en être convaincu de vérifier soi même sur les cartes de la région que Djeddah se trouve bien à l’intérieur de la zone délimitée par les mawâqît. Les oulémas d’Arabie Saoudite s’accordent d’ailleurs tous sur ce point.4
3- C’est l’avis qui présente le plus de précaution : Celui qui l’adopte s’écarte ainsi de la divergence opposant les oulémas sur la question, et ce, sans faire peser un quelconque risque sur la validité de sonihrâm –et, par extension, de son oumrah ou de son hadj…
Certaines personnes font parfois remarquer qu’il leur est vraiment pénible de se mettre en état d’ihrâmdurant le vol, avant d’arriver à Djeddah, et c’est ce qui les pousse à suivre le second avis. Cette réaction est néanmoins difficilement compréhensible… En effet, retarder l’ihrâm jusqu’à Djeddah ne permet de gagner, tout au plus, que quelques heures de « confort ». Il est vraiment étonnant qu’une personne qui va être amenée à rester en état d’ihrâm pendant plusieurs jours du hadj n’arrive pas à consentir au « sacrifice » que représente pour lui la perte de ces quelques heures de « confort »… Et ce, d’autant plus que le voyage du hadj, dans son esprit, est justement un rituel dont la réalisation impose des sacrifices physiques et financiers pour le plaisir d’Allah…
b) Il ne faut pas dénigrer ceux qui suivent l’avis minoritaire.
Wa Allâhou A’lam !
(A suivre…)
Notes :
1- Pour les gens résidant dans les limites de al hill ous saghîr ou sur les terres du haram, les règles sont particulières :
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Les premiers doivent se mettre en état d’ihrâm là où ils habitent s’ils désirent se rendre à Makkah.
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Les seconds, s’ils désirent accomplir l’oumrah, doivent quitter les limites du haram pour initier l’ihrâm. Pour faire le hadj, ils se mettront en état de sacralisation de l’endroit même où ils se trouvent.
2- Chacune d’entre elles se trouve sur une des voies terrestres employées à l’époque de la Révélation pour se rendre à Makkah…
3- En principe, le moment venu, l’équipage (à la demande de la tour de contrôle de l’aéroport de Djeddah) informe les passagers de la proximité du point se trouvant au niveau du mîqât le plus proche (yalamlam, pour les pèlerins venant de la Réunion).
4- Ceux qui connaissent l’ourdou peuvent trouver une excellente étude à ce sujet dans les « Ahsan oul Fatâwa »de Moufti Rachîd du Pakistan.