La dynamique interne des écoles de jurisprudence...


Remarque par rapport au « Taqlîd »:

Si l’Imâm Ach-Chafi’i (r.a) (par exemple) a changé beaucoup de ses avis dans l’espace de quelques années (au point où l’on parle de son « ancien fiqh » et de son « nouveau fiqh »), j’ai du mal à accepter que l’on oblige les gens à adopter toutes ses positions (ou celles d’un autre Imâm) après plus d’un millier d’années et après tous les ouvrages qui ont fait évolué les sciences de fiqh et de hadith.

Précisions à ce sujet:

Il est tout à fait exact que l’Imâm Châféi r.a. a modifié un certain nombre de ses avis (portant sur les « Fourou' » (règles juridiques secondaires), et non pas sur les « Osoûls » (principes juridiques de base), à ma connaissance…) lorsqu’il vint s’établir en Égypte, où les conditions sociales et les usages en cours dans la société musulmane était bien différents par rapport à l’Iraq (où ses premiers travaux juridiques avaient été réalisés). Et on retrouve chez les autres « Moujtahidînes » également des exemples d’avis (portant là encore sur des « Fourou' », non pas sur des « Osoûl ») sur lesquels ils sont revenus à un moment donné.

Mais il faut également relever que les juristes qui ont suivi ces « Moujtahidînes Al Moustaqillînes« et qui ont codifiés les principes et règles que nous retrouvons dans l’enseignement de chacune des écoles de jurisprudence ont fourni un travail remarquable pour assurer une dynamique interne à ces écoles, en s’attachant justement à « faire un tri » parmi les différents avis rapportés du « Moujtahid » dont ils avaient choisi de suivre l’enseignement, le but étant bien entendu d’établir une codification qui soit la plus respectueuse et la plus proche des références de base.

Ce travail au sein des écoles à commencé très tôt, par le biais notamment des illustres savants connus sous l’appellation de « Moujtahidines fil Madhab« , tels que Qâdhi Abou Yoûssouf r.a., l’Imâm Mouhammad Ach Chaybâni r.a., l’Imâm Zoufar r.a. (pour l’école hanafite), l’Imâm Abou Thawr r.a., l’Imâm Bouwaïti r.a., l’Imâm Mouzani r.a. (pour l’école châféite), l’Imâm Sahnoûn Ibnoul Qâsim r.a. (pour l’école mâlékite) ou encore l’Imâm Kharqi r.a., l’Imâm Abou Bakr Mirwazi r.a. et l’Imâm Abou Bakr Athram r.a. (pour l’école hambalite).

Par la suite, ce travail en profondeur a continué par l’intermédiaire de ceux qui sont appelés »Moujtahidines fi Takhrîdj« . Parmi ceux-ci, on pourrait énumérer les savants tels que Al Khassaf r.a., l’Imâm Tahawiy r.a. (l’auteur du célèbre « Aqidat out Tahâwiyah »), Al Karkhi r.a., Al Halwâniy r.a., As Sarakhsi r.a., Al Bazdawi r.a., Qâdhi Khân (tous de l’école hanafite), Al Abhouriy r.a., Ibné Abi Zayd Al Qayrwâni r.a. (de l’école mâlékite), Abou Ishâq Ach Chirâzi r.a., Al Mirwazi r.a., Mouhammad Ibné Djarîr r.a., Abi Nassr r.a., Ibné Khouzeïmah r.a. (de l’école châféite), Qâdi Abou Ya’lâ r.a., Qâdhi Abou Aliy Ibné Abi Moussa r.a. (de l’école hambalite)…

Sont venus ensuite les « Moujtahidines fit tardjîh » , tels que Al Qoudoûri r.a., Al Mourghînâni r.a.(de l’école hanafite), Allâmah Khalil r.a. (de l’école mâlékite), Al Râfiy’ r.a., An Nawawi r.a. (de l’école châféite), Qâdhi Alâ oud Dîne r.a. (de l’école hambalite)… et bien d’autres encore après qui ont tous apporté leur contribution dans l’établissement des règles juridiques respectant l’esprit des « Osoûl » (principes fondamentaux) en vigueur dans l’enseignement de leur école, tout en s’assurant de leur correcte adaptation suivant le contexte.

Bref, il y a depuis toujours eu cette dynamique au sein des différentes écoles. Celui qui choisit donc le « Taqlîd » de l’une d’entre elles, en s’appuyant sur cette somme d’efforts réalisés par les juristes à travers les âges, n’est, Incha Allah, pas fautif dans son attitude.

Wa Allâhou A’lam !

Et Dieu est Plus Savant !


« Al Moudjtahid Al Moutlaq Al Moustaqill »: Cette appellation est donnée par les spécialistes du droit musulman au savant et juriste qui avait développé lui-même, à partir des références premières, un ensemble de principes fondamentaux du droit, sur lesquels il a bâti son « Fiqh », sa jurisprudence (pour de plus amples renseignement au sujet du « Idjtihâd », voir l’article sur « Les écoles de jurisprudence islamique.« ). On compte dans cette catégorie les savants tels que Abou Hanîfah, Mâlik, Ach Châféi et Ahmad Ibné Hambal r.a. 

« Al Moudjtahid Al Moutlaq Ghayr oul Moustaquill » ou « Moudjtahid fil madhab »: Il s’agit du savant et juriste qui possède les compétences requises pour procéder au « Idjtihâd », mais qui n’a cependant pas élaboré lui même à partir des références premières des principes de droit… A ce niveau, il a plutôt préféré adopter les enseignements de l’Imâm « Moudjtahid » qu’il a choisi de suivre. 

« Al Moudjtahid Al Mouqayyad » ou « Moudjtahid out Takhrîdj »: Est ainsi désigné le savant qui pratique le « Idjtihâd » en ce qui concerne les questions et règlements qui n’ont pas été évoquées par le « Moudjtahid » fondateur de l’école à laquelle il adhère.

« Moudjtahid out Tardjîh »: C’est le juriste qui est mesure d’accorder préférence à un avis en particulier parmi plusieurs avis différents qui sont rapportés de l’Imâm fondateur de l’école qu’il suit, ou des élèves de cet Imâm sur une question donnée.

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