Dieu regarde vos coeurs et vos actes...


Abou Houreïra, Abdour Rahmân Ibn Sakhr (radhia Allâhou anhou) rapporte que le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) a dit:

« Certes, Allah ne regarde pas vos corps ni vos visages, mais Il regarde vos cœurs et vos actes. » (Rapporté par Mouslim)

Explications et commentaires:

Le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) nous interpelle ici vers une réalité qui a été exprimée clairement dans le Qour’aane : la considération divine ne porte par sur l’aspect extérieur, les traits ou les qualités apparentes de l’être humain; ce qui fait l’objet de jugement –et donc de rétribution – de la part d’Allah, ce sont bien le cœur et les actions humaines, et nullement sa race, son origine, sa couleur, sa langue, sa physionomie… En d’autres mots, le critère de valorisation aux yeux du Créateur, c’est la Taqwâ –la crainte révérencielle-, qui siège au fond du cœur et qui s’exprime nécessairement, en apparence, par les bonnes œuvres.Allah dit:

وَمَا أَمْوَالُكُمْ وَلَا أَوْلَادُكُم بِالَّتِي تُقَرِّبُكُمْ عِندَنَا زُلْفَى إِلَّا مَنْ آمَنَ وَعَمِلَ صَالِحاً فَأُوْلَئِكَ لَهُمْ جَزَاء الضِّعْفِ بِمَا عَمِلُوا وَهُمْ فِي الْغُرُفَاتِ آمِنُونَ
« Ni vos biens ni vos enfants ne vous rapprocherons à proximité de Nous. Sauf celui qui croit et oeuvre dans le bien. Ceux-là auront une double récompense pour ce qu’ils oeuvraient, tandis qu’ils seront en sécurités, aux étages supérieurs (du Paradis). » 
(Sourate 34 / Verset 37)

Il dit encore:

يَا أَيُّهَا النَّاسُ إِنَّا خَلَقْنَاكُم مِّن ذَكَرٍ وَأُنثَى وَجَعَلْنَاكُمْ شُعُوباً وَقَبَائِلَ لِتَعَارَفُوا إِنَّ أَكْرَمَكُمْ عِندَ اللَّهِ أَتْقَاكُمْ إِنَّ اللَّهَ عَلِيمٌ خَبِيرٌ
« Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux. Allah est certes Omniscient et Grand-Connaisseur. » 
(Sourate 49 / Verset 13)
On remarquera que, dans l’énoncé de ce présent Hadith, l’évocation ducœur précède celle de l’action: il faut voir là un rappel du rôle capital du premier pour l’agrément du second. En effet, comme le souligne Qâdhi Iy’âdh r.a. en commentant ce Hadith, c’est bien des pieuses intentions -celles portant sur la réalisation du bien- qui les animent que les actes tirent leur valeur réelle.Voilà pourquoi les savants musulmans insistent tant sur le fait que les actions ne doivent être considérées que comme des indicateurs et des signes apparents – »amârât dhanniyah » (qui permettent à tout observateur de se faire une certaine idée de la réalité d’une situation donnée) – et non comme des preuves irréfutables – »dalâïl qatiyah » (établissant de façon catégorique ladite réalité)…C’est en considérant ce principe très important que l’on arrive aussi à saisir pourquoi il ne convient pas, pour le musulman, de faire preuve d’exagération dans son jugement –positif ou négatif- de ceux qui l’entourent:- Ainsi, chacun doit s’efforcer de faire preuve de maîtrise et de modération dans ses louanges à l’égard de l’action d’autrui lorsqu’il ne base son appréciation que sur les bonnes œuvres apparentes de ce dernier… Il en effet tout à fait concevable que ce qui semble être un acte très noble de sa part n’est pas agréé par Allah en raison d’un défaut souillant l’intention qui l’a motivé.

– De la même façon, la critique du musulman se doit d’être réfléchie dans le cas où il voit quelqu’un commettre un mal. Bien évidemment, il a pour devoir de considérer tout péché comme tel et, en conséquent, de condamner celui-ci dans le cadre du « nahiy ‘anil mounkar ». Mais il n’a pas le droit de se laisser aller à des jugements catégoriques sur le sort final du fautif, en tranchant par exemple à son sujet qu’il ira en Enfer à cause de son acte: d’abord parce qu’il n’appartient à aucune créature de substituer son jugement à celui d’Allah, mais aussi parce qu’il est tout à fait possible qu’il y ait au fond du cœur de la personne concernée une qualité qu’Allah apprécie, ce qui fait qu’Il, par Sa Miséricorde et Sa Clémence, lui donnera l’opportunité de se faire pardonner pour ce qu’elle a fait.

Par ailleurs, dans ce genre de situation, il faut savoir orienter correctement son jugement: il ne s’agit pas de mépriser, en soi, la personne du musulman de la part de qui nous pouvons constater des actes condamnables, mais bien de détester et de condamner la situation et la condition malsaine liée à la réalisation des péchés concernés. Ce dernier point a été explicitement mentionné par l’Imâm Qourtoubi r.a. dans son commentaire du Qour’aane. Par rapport au contenu de ce Hadith, on soulignera également que, dans ses propos, le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) a mis l’emphase aussi bien sur le cœur que les actes: il n’a donc jamais été question de considérer la purification du cœur comme étant la seule chose essentielle requise de la part du musulman. Comme l’écrit Moufti Taqui Outhmâni, contrairement à ce que prétendent parfois certains, les références du Qour’aane et de la Sounnah expriment très clairement l’obligation pour le musulman de corriger et de parfaire ses actions, qui restent, comme indiqué précédemment, des signes apparents témoignant de l’état du cœur.Enfin, lorsqu’il est exprimé dans ce Hadith que le jugement divin n’est pas lié à l’apparence humaine, cela ne signifie pas du tout que les principes et les enseignements de l’Islam n’ont pour objet, en aucune façon, une quelconque « réforme » de l’aspect extérieur du musulman, ce dernier pouvant « gérer » son apparence physique comme bon lui semble, rien ne lui étant prescrit à ce sujet: comment pourrait-il en être autrement, alors que des dizaines et des dizaines de Traditions Prophétiques énoncent des règlements explicites et des injonctions très claires en rapport avec l’apparence physique justement, comme c’est le cas par exemple pour les Hadiths imposant aux hommes de se laisser pousser la barbe et de se tailler les moustaches, ou encore, ceux qui interdisent aux femmes de s’épiler les sourcils… Ainsi, par ses propos, le Prophète Mouhammad (sallallâhou alayhi wa sallam) exprime juste que les traits naturels et la beauté physique ne sont pas des facteurs ayant une quelconque influence pour s’attirer l’agrément –ou la colère- d’Allah…
Wa Allâhou A’lam !
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